VIE POLITIQUE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH-
ESSAI KAMEL BOUCHAMA- KAID AHMED, HOMME D’ETAT
Kaid Ahmed, homme d’Etat. Essai
de Kamel Bouchama. Juba Editions, Alger 2011,
509 pages, 1 000 dinars
Tout démarre par le « coup de foudre » , d’un jeune militant du Fln bouleversé , sinon
révolté par le « coup d’Etat du 19 juin 1965 », comme beaucoup
d’autres jeunes à ce moment de notre Histoire politique (ce qui leur a valu la
prison, la matraque, la torture pour beaucoup et la mort pour certains, tout
simplement parce qu’ils étaient pour la légalité et contre la prise de pouvoir
par la force des baïonnettes ) et d’un ancien combattant , la Commandant
Slimane, Kaid Ahmed, faisant partie du Conseil de la
Révolution et chargé par le « pouvoir révolutionnaire » de reprendre
en mains le Parti ( plus unique que
jamais ) et surtout ses « organisations de masse », un peu trop
rebelles (exemple de l’Unea) au changement
opéré ,gagnées par une « désagréable léthargie et le
renoncement » (exemple de la Jfln) .
Premier meeting, premier « flash ». Au lieu d’avoir
, en face , un « rustre », un « officier aussi cinglé que
prétentieux » , « un homme à
blagues » à qui la « vox populi » et les perfides prêtaient beaucoup de bêtises et galéjades,
des mots alors oubliés sont
prononcés : « Combattre les disparités, l’ignorance, la misère,
l’injustice, le laisser-aller et autres comportements qu’il faut bannir des
pratiques de tous les jours ». Au
diable les préjugés ! L’encore jeune militant de la Jfln
avait en face de lui « un responsable digne de ce nom, dans le sens du
savoir et pouvoir prendre toutes les décisions qui s’imposainet
dans des domaines qui nécessitaient son intervention, franche et
concrète »…..Si Slimane. Ce fut le début d’un long parcours et d’une
admiration sans bornes, décrite avec détails (parfois rendant assez
difficile la lecture de l’ouvrage mais
en définitive très intéressants) pour un véritable « homme
d’Etat » au « cœur de lion » et à l’esprit vif , un peu trop peut-être
, trop en avance sur son temps ou trop décalé par rapport à ses
compagnons de lutte (mis à part Ferhat Abbas, son maître politique originel)
Kaid Ahmed, ou
Commandant Slimane ou Slimane « Klata »
(c’est tout dire sur son caractère libre et réfractaire à tout carcan organique
qui bride la réflexion et les initiatives, n’hésitant pas à foncer dans le tas
si besoin est ) , est né le 17 mars 1921
à Tagdempt , fils de petits propriétaires terriens, fils de chahid,
bachelier puis instituteur, militant du Ppa puis
de l’Udma (il
fut à l’origine, en 1949, de la création de la Jeunesse de l’Udma dont le 1er congrès eut lieu à Tiaret le 26
août 1953) , journaliste aussi,s’engageant
immédiatement dans le combat armé (selon Ferhat Abbas lui-même, il était au
courant des attentats dans la nuit du 1er Novembre ) ,opposant au
régime de Ben Bella , plusieurs fois
ministre (Tourisme en 1963, poste dont il démissionnera, Finances et Plan en
juillet 1965.. ), membre du Conseil de la Révolution, responsable de l’Appareil du parti Fln en
mars 1968 et jusqu’en décembre 1972 , opposant à Boumediène
(malgré la forte amitié passée) …….décédé en exil à Rabat ,d’une « crise
cardiaque » le 5 mars 1978….à l’âge de 56 ans. Une fin tragique ?
Comme celle de son ami Ahmed Medghri le 10 décembre
1974 ! Son enterrement, à Tiaret, dans des conditions difficiles, a draîné des dizaines de milliers de personnes.Un
enterrement digne d’un « Homme d’Etat », intellectuel incompris et
jalousé de surcroît.
L’Auteur : Né en 1943 à Cherchell, des études au Caire et
à Alger….ce qui fait de lui un parfait bilingue doté d’une vaste culture,
animateur de la Jfln et un des plus jeunes responsables au sein du
Fln, alors parti politique unique au pouvoir, ancien ministre de la Jeunesse et
des sports (janvier 1984- décembre 1987), ancien Ambassadeur en Syrie (2001) ,
il a,
depuis sa retraite, écrit un grand nombre d’ouvrages ; des essais
et des romans ainsi qu’ une biographie de M-C Messadia
qu’il a longtemps cotôyé.
Avis : Un livre d’Histoire ? Pas sûr. Mais ce qui
est certain , c’est qu’il raconte une tranche
d’histoire pas inutile à lire pour
comprendre toutes les autres et l’ensemble. En annexes, des photos, mais
surtout un document à ne pas rater : le mémorandum adressé aux membres du
Conseil de la Révolution juste avant la rupture
Citations : « Dans toutes les pages d’Histoire,
il y a de belles choses, mais il y a aussi de moins belles….il faut les dire.
Il faut s’assumer » (p 24) , « Dans un pays où le pouvoir personnel joue un
rôle, un parti politique n’a rien à dire » (Kaid
Ahmed, p 77).