CULTURE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ETUDE
PAUL MONCEAUX- « LES AUTEURS LATINS D’AFRIQUE..... »
Les auteurs latins d’Afrique. Les Païens
(La littérature Latine d’Afrique). Etude historique de Paul Monceaux. Alger-Livres
Editions, Alger 2016 (Lecen, Oudin
& Cie , Paris 1894. Titre original :
« Les Africains. Etude sur la littérature latine d’Afrique »). Texte présenté
par l’éditeur. 950 dinars, 398 pages .
Ils ont été bien souvent d’habiles lettrés ou
d’ingénieux savants. Plusieurs d’entre-eux sont partis
par Rome (qui occupait une bonne partie du pays durant des siècles), où leur
science et leur talent devaient trouver un théâtre plus retentissant
. Beaucoup n’ont pas quitté la terre d’Afrique où ils se sentaient
entourés de l’estime publique.
Eux, ce sont des dizaines et des dizaines de
lettrés et certains ont encore leur nom inscrit au frontispice de la culture
universelle .....oubliés, hélas seulement par leurs descendants directs,
nous.....et , par la suite , en bonne partie récupérés
par les Occidentaux sous couvert de latinité ou de chrétienneté. Eux, ce sont les « Africains » du
nord (surtout l’Algérie et la Tunisie ) , hommes de lettres, chroniqueurs, poètes,
fabulistes, dramaturges, rhéteurs, médecins, tribuns, grammairiens, métriciens,
naturalistes, juristes...... Eux ce sont Apulée de Madaura,
Augustin d’Hippone, Apollinaire (de Carthage) , Fronton de Cirta, Tertullien,
Arnobe, Alype, Antoninus
Aquila, Cyprien, Lactance, Pactameius de Cirta, Commodieu, Térentien le Maure,
Juba, Victorin et Servius, Priscien
de Caesarea, Possidus,
Aulu-Gelle, Felix, Friscien
de Cirta, Dracontius,
Dineontius, Manilius, Cornutus de Leptis, Florus, Némesien
de Carthage.....formant une « nation dans le domaine des lettres
latines » Avec , bien sûr, le lot habituel des « charlatans de
science ». Donc, une série d’écrivains- païens puis chrétiens, chacun
défendant ses idées ou sa foi - considérables , maîtrisant le latin et /ou le grec mais parlant et pratiquant la même
langue (un mélange de latin, de grec, de libyco-punique et de patois local ) ,
certains ouvertement hostiles à l’occupant, d’autres politiquement ralliés et
en apparence à demi gagnés, « mais , au fond, par un instinct de race,
tous rebelles à l’action romaine, obstinés dans le souvenir de leurs vieilles
traditions, de leurs coutumes, de leurs dieux, de leur langue, et d’ailleurs
défendus dans leur farouche indépendance ou tout au moins préservés d’une
absorption complète par la structure du sol natal »
Certains sont partis et sont même devenus , à Rome
même, des hommes d’autorité ou
empereurs : Septime Sévère, le Maure Macrin, le Maure Emilianus, Mémor, Carusouis et ses
fils Carinus et Numérien, Jumianus,.......
L’Auteur : Né en 1859 et
décédé en 1941.Historien, archéologue, philologue et latiniste, ancien
professeur à L’Ecole supérieure des lettres d’Alger (1884) et au Collège de
France ( 1907-1937), membre de l’Académie des inscriptions et belles –lettres.
Extraits : « En
Numidie et jusqu’aux environs de Carthage, la civilisation latine n’a jamais pu
entamer bien des îlots de langue punique ou berbère » (25) , « Cette
Afrique indigène, là contenue par la force, ici ralliée en apparence, mais
nulle part complèrement assimilée, a toujours
développé et menacé l’Afrique officielle qu’elle a fini par étouffer » (p 36), « Après trois mille ans de
dominations étrangères, la race indigène subsiste encore dans tout l’Atlas,
presque intacte, irréconciliable et toujours menaçante » (p 39), « A
Carthage, comme dans tous les pays du monde, on rencontrait deux sortes
d’étudiants : ceux qui étudient , et ceux qui regardent étudier. La
seconde catégorie était naturellement la plus nombreuse » (p 63)
Avis : Un livre qui nous
fait remonter le temps pour (re-)
découvrir les vraies racines de notre peuple , avec la
valeur et la gloire de ses intellectuels.
Citations : « Tous les Berbères ont en commun la passion de l’indépendance.
Mais cette indépendance, ils n’ont jamais pu l’assurer tout à fait, parce
qu’ils ne savent point sacrifier la petite patrie à la grande » (p 39) , « Le sol africain est l’un des facteurs et non des
moindres de la littérature africaine. Ici, pour comprendre l’homme de lettres,
il faut regarder la nature » (p 47) , « On aime à médire
de ce qu’on sait mal » (p 52) , « L’homme est déjà dans l’enfant, et
la pauvre nature humaine n’attend pas que la barbe pousse pour revendiquer ses
droits « (p 57) , « La physionomie du lettré d’Afrique . C’est
un Janus à double face : d’une part , le profil
net, expressif, résolu de l’Européen ;de l’autre, la mine ondoyante et
rêveuse de l’Oriental » (p 86) , « En aucun pays, la langue d’un
peuple conquérant ne se fait accepter et ne se répand sans beaucoup de
concessions au parler traditionnel des peuples conquis » (p 93)