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Essai Houria Chafai Salhi- "Ce drôle de môme...(L'enfant autiste)"

Date de création: 20-01-2019 10:05
Dernière mise à jour: 20-01-2019 10:05
Lu: 1237 fois


SANTE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ESSAI HOURIA CHAFAI SALHI –« CE DRÔLE DE MÔME....(L’ENFANT AUTISTE) »

Ce drôle de môme.....(L’enfant autiste). Essai de Houria Chafai-Salhi.. Koukou Editions , Cheraga banlieue/ Alger 2018, 500 dinars,127  pages

 

Un seul objectif ? Non, plusieurs. D’abord remettre l’enfant (autiste en particulier) au centre comme sujet. Ensuite, plaider pour une alliance de travail  -utile et nécessaire – entre professionnels (médecins psychiatres) et parents.

Tout d’ abord, on a la réponse à une interrogation cruciale :   Qu’est-ce que l’Autisme ? Un terme forgé, au départ, par le psychiatre suisse Bleuler  pour caractériser un des symptômes principaux de la schizophrénie. Quelques signes : Un isolement extrême/ Un désir obsédant de préserver l’immuabilité de son environnement/ Un déficit de communication/Une diminution de l’empathie/Une maladresse physique... Des signes pas faciles à saisir et à comprendre tant par les parents que par l’environnement (certains professionnels y compris) .....malgré la pléthore d’écrits sur l’Autisme et autour de l’Autisme.

Ensuite, la clinique de l’Autisme. Dans ce domaine et peut-être encore davantage qu’ailleurs, elle doit être interactive et contre transférentielle, associant les parents dans toutes les étapes, celle du diagnostic, celle du choix de stratégie de prise en charge et tout au long de son déroulement.

Puis l’Etiologie de l’Autisme..... Certes il y a eu ces dernières années des avancées indéniables de la recherche en neurosciences mais, en l’état actuel des connaissances, elle n’a pas encore été élucidée. Ce qui paraît certain (en tout cas pour l’auteure) ce n’est pas l’inaptitude ou le rejet inconscient des mères qui est à l’origine de l’Autisme. Il est vrai que , longtemps, dans le cadre de la théorie psycho génétique de l’Autisme, on a souvent pris les effets pour des causes, disqualifiant, étiquetant « réfrigérantes » et  culpabilisant  de nombreuse mères .

Enfin la Prise en charge psycho- thérapeutique .....d’enfants qui ont besoin de protection, de socialisation , d’éducation et d’instruction....d’où la mise en jeu d’un trépied qui combine , de façon complémentaire , un triple abord, éducatif, pédagogique et thérapeutique

Passage intéressant, celui du cadre de la prise en charge et ses caractéristiques principales : être contenant, sécurisant et stimulant ...tout en  réhabilitant la notion d’empathie... (p 83 à 92)

Aux psy’ donc d’avoir pour les enfants concernés des objectifs autrement plus ambitieux, ne se suffisant pas de traiter l’Autisme comme un simple handicap.....l’assimilant à une simple déficience à rééduquer et à des comportements déviés à corriger. « La pire violence faite à l’enfant autiste est de le laisser « face à ses démons » en se bornant à réprimer ses comportements compulsifs....L’injure qui lui est faite est de le réduire à n’être qu’un anormal à normaliser ...en lui déniant toute valeur originale et toute créativité » (p 92)

Quand à l’Etat, même si « l’enfant le lui appartient pas », son rôle est de le protéger (y compris éventuellement contre des parents abusifs) et de veiller à ce que des besoins fondamentaux soient satisfaits. Encore, faut-il être fait de  l’alliage subtil de la raison, de l’intelligence et du cœur. Pour l’instant, seuls les poètes (et l’auteure qui nous a présenté quelques unes de ses  expériences sur le terrain tout au long de sa riche carrière), « loin du tumulte, des « bruits et de la fureur » ont su garder la substantifique moelle de ce qui fait vraiment l’essence humaine »

A signaler une partie, assez riche, consacrée aux sources bibliographiques, à travers des fiches biographiques de scientifiques ...connus ou méconnus.

L’Auteure : Médecin psychiatre « au parcours atypique », aujourd’hui à la retraite. Une très grande dame de la médecine et de l’humain. Dès 1979, elle a investi l’asile « Joinville » (Blida)  alors délaissé pour en faire une Ecole de formation de psychiatres dés-aliénistes, devenue un pôle de recherche méditerranéen et initié sa transformation en Chu.  Elle a créé, en 1992, toujours à Blida, le premier service de pédopsychiatrie avec ,en appoint, la fondation de l’Association « Arpeij ».Professeur invitée dans deux universités françaises : Toulouse de 1994 à 2000 , puis Brest.

Auteur de trois ouvrages (« Tsouha, tu grandiras », édité en 1992 par l’ Enag ,  « L’écouteur de rosée », édité par l’Unicef en 2003 et « Arpéger, le métier d’éducateur » édité par Arpeij en 2012) et de plusieurs ouvrages collectifs

Extraits « Il est nécessaire pour que le bébé ressente qu’il n’est plus lié à sa mère par le cordon ombilical, qu’il n’en est plus un appendice mais un sujet à part entière » (p 23) , « Pendant toute la gestation, l’homme ne vit son statut de père que par procuration, par intermédiaire et de façon uniquement symbolique puisque c’est la femme qui l’institue père. Ce n’est qu’à la naissance qu’il accède vraiment à son rôle de père » (p 25), « En transgressant l’interdit, apparemment mue , uniquement, par la « curiosité féminine » et l’audace, Eve prend le risque de l’exil de l’Eden. Risque d’autant justifié que l’ennui de cette vie végétative , sans cesse recommencée, devait lui peser lourdement. Cette audace d’Eve est à admirer, non à déplorer. » (p 29), »Aucun enfant n‘est content de sentir un adulte lui baver dessus, lui pincer les joues ou lui ébouriffer les cheveux. Toutes ces privautés que nombre d’adultes se permettent à son égard, sont, pour lui, déplacées quand elles viennent de n’importe quel quidam qu’il n’a pas choisi, tant elles sont réservées à ses proches » (p 54)

Avis : Il y a une abondance , pour ne pas dire une pléthore d’écrits sur l’Autisme et autour de l’Autisme.....mais ce « petit livre .....opuscule , n‘étant pas d’ordre académique » ne fait pas que décrire. « Formulation narrative émaillée de digressions », il vulgarise un savoir utile sur l’Autisme basé sur une longue expérience. A lire, et à faire lire....et, pour les parents concernés, à conserver précieusement.

Citations : « Etre au plus proche, ce n’est pas toucher :la plus grande proximité est d’assumer le lointain de l’autre » (Jean Oury, cité par l’auteure, p 68), « Il ne faut pas mythifier la jeunesse, elle est capable du meilleur comme du pire » (p 81), « Il est facile d’écouter, mais c’est une toute autre chose que d’être apte à entendre ce qui se dit des émotions « (pp 88-89)