POPULATION –MIGRATION EN ALGERIE- SAHEL-DELINQUANCE
(c) Abla Cherif/Le Soir d’Algérie, mercredi 16 janvier 2019
Le sujet semble avoir été passé
longtemps sous silence, «mais l’évolution de la courbe de la criminalité et du
banditisme dans les milieux des migrants devient aujourd’hui une grande
préoccupation dans le pays», affirment les responsables en charge de la
situation. Explications : «Longtemps, Alger s’est abstenue d’évoquer le sujet
pour éviter toute nouvelle polémique, des malentendus, des interprétations
erronées des données mais aussi pour éviter de jeter le discrédit sur une
population désemparée qui commençait à parvenir progressivement vers le
territoire national où elle pouvait enfin se trouver en sécurité. Pas seulement
physique, mais aussi alimentaire, sanitaire, autant d’aspects primordiaux ayant
presque ou complètement disparu dans les pays d’origine. Force est de constater
que parmi le lot de ces malheureux, des personnes malintentionnées ont profité
de la situation pour se mêler aux réfugiés.
D’autres se sont retrouvées face à la réalité, celle d’un quotidien
essentiellement fait pour les personnes qui travaillent, en quête permanente de
subsistance, mais l’absence de formation, leur mode culturel, leurs habitudes
en fait les empêchaient de prendre le train en marche. Ils ont viré dans la
délinquance ou ils en étaient prédisposés. Un bilan établi par le ministère de
la Justice «montre que la courbe est ascendante», poursuit la même source. Les
chiffres que nous avons pu obtenir se basent sur des statistiques établies par
la justice et s’étalant sur les huit dernières années, soit de 2010 à 2018.
Durant cette période, la justice a condamné 71 447 migrants pour des motifs
différents. 70 589 ont été condamnés pour délits et 859 pour crimes, précisent
les mêmes statistiques. Elles démontrent aussi que seize nationalités sont
concernées : Mali, Niger, Nigeria, Guinée, Cameroun, Côte d’Ivoire, Soudan,
Bénin, Burkina Faso, Sénégal, Ghana, Liberia, Tchad, Gambie, Djibouti, Gabon.
En tête de liste, s’affichent les Maliens et Nigériens avec un taux de 62,59%
(44.725 crimes et délits) du total des migrants condamnés. Ils sont suivis du
Nigeria, Guinée, Cameroun et Côte d’Ivoire. Le bilan établi par le ministère de
la Justice classifie ensuite les crimes et délits commis selon leur ordre
d’importance. Constitution de groupes de contrebande, falsification de monnaie,
trafic de drogue, mais aussi apologie pour les groupes terroristes. Avec le
Cameroun, les migrants en provenance du Mali, du Niger et du Nigeria viennent
en tête de liste. Selon le degré de gravité, le bilan présente
ensuite la nature des délits ayant mené à des condamnations. La liste s’avère
longue.
Le vol, la possession de drogue, la «possession de matériel de falsification»
sont signalés aux côtés d’autres délits tels que «la falsification de documents
administratifs» et l’usurpation d’identité. «Le phénomène est connu, de très
nombreux migrants préfèrent brouiller les pistes et se débarrassent donc de
leurs papiers avant leur entrée sur le territoire national. D’autres se font
faire de faux papiers, et, globalement, on ne sait plus à qui on a
affaire.
Tous affirment fuir la misère, la guerre, mais tous ne viennent pas aussi avec
la même intention. Est-il acceptable d’accueillir sur son territoire des
personnes dont on ne sait rien, même pas le nom véritable ou la nationalité ?
demande notre interlocuteur. Cette situation pose aussi un grand problème de
sécurité. Cela demande aussi un grand travail de recherche, une mobilisation de
tout instant. Ces mêmes personnes tentent ensuite de travailler ou de se faire
embaucher, mais c’est au noir, et d’autres problèmes peuvent encore en
découler. C’est un autre délit pour lequel plusieurs personnes ont été
condamnées», indiquent nos sources. Sur les 14 types de délits recensés, le
ministère de la Justice évoque aussi celui de la résistance et refus
d’obtempérer aux décisions émanant des tribunaux. «Il est très fréquent de voir
des migrants refuser d’être expulsés, reconduits aux frontières, ces derniers
prennent la fuite et s’évanouissent dans la nature avec on ne sait quelle
intention.
Il s’ensuit des recherches et une nouvelle fois mobilisation des services de
sécurité. La remontée de la délinquance subsaharienne vers l’Algérie est une
réalité et l’une des raisons pour laquelle toute forme de migration illégale
sera empêchée et punie», concluent nos interlocuteurs.