POPULATION- ENQUETES ET REPORTAGES- ENFANCE- ENTRETIEN EL MOUDJAHID/KHIATI (5/01/2019)
En matière
de santé, la baisse du taux de mortalité infantile pour les moins de 5 ans, et
de plus en plus pour les moins d’un an sont considérées comme des acquis
importants. L’Algérie occupe la 69e place dans le classement par pays pour ce
qui est du taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans ; ce taux est passé
de 68 % en 1990 à 36 % en 2010. S’agissant des enfants âgés de moins d’un an,
le taux reste à 25 pour 1000 classant l’Algérie à la 141e place avant l’Egypte,
la Tunisie, la Syrie et l’Iran. On peut considérer que l’objectif du millénaire
est atteint. La malnutrition diminue bien que lentement. Selon l’enquête
MICS-OMD publiée en 2008, la situation nutritionnelle des enfants algériens
révèle un taux de malnutrition de près de 18 % chez les enfants de moins de
cinq ans, dont 106 000 connaissent une insuffisance pondérale, 320.000
souffrent d’un retard de croissance et 83.000 souffrent d’une insuffisance
staturo-pondérale. Cette enquête montre une relative amélioration par rapport à
une autre enquête réalisée en 2000 laquelle démontrait que le taux global de
malnutrition était de 28 % chez les enfants de moins de 5 ans (soit près de
850.000). Troisième acquis pour les enfants : la loi 12-15 sur la protection
des droits de l’enfant et l’organe de la protection et promotion des droits des
enfants auprès du Premier ministère ; révision du code pénal (2014) , programme d’alerte, disparition , la mise en place du
numéro vert 1111 relatif aux maltraitance des enfants…
Déséquilibre !
Néanmoins, ces avancées, aussi importantes soient-elles, ne correspondent pas
aux efforts considérables déployés par l’Etat. Au plan de l’éducation, 15 % des
enfants quittent l’école avant la fin du cycle primaire. L’Unicef estime
même que 27,2 % des enfants de moins de 15 ans sont analphabètes.
Au plan santé, les ruptures fréquentes de vaccins et médicaments divers mettent
en danger la santé de ces derniers et créent un dysfonctionnement dans le
programme national de vaccination.
Au plan nutritionnel, l’absence d’une politique d’éducation sanitaire est
derrière le recul constant de l’allaitement maternel : moins de 13 % des
enfants de moins de 6 mois sont allaités au sein. À cela, il faut ajouter que
20 000 enfants décèdent avant leur naissance en Algérie et qu’environ 20 000
autres avant d’avoir atteint leur première année. La
couverture sanitaire n’est pas équitable comme en témoigne le fort taux de
décès de femmes en couche dans les zones excentrées, des Hauts Plateaux et du
Sud. Sur les autres plans, on peut considérer qu’il y a peu d’efforts ou que la
situation piétine faute d’une action efficiente. Par ailleurs, plus du quart de
nos enfants sont victimes de maltraitance (enquête Forem
2003 : 27 % ; enquête Unicef 2009 : 22,5%).
Le nombre réel de maltraitance est difficile à calculer mais on peut arrêter un
chiffre minimum de 50.000 cas/an. Dans ce cadre, les agressions sexuelles
deviennent un véritable phénomène de société, leur nombre a été estimé à prés
de 10.000 en 2010.
Les enfants victimes souffrent dans le silence. Les tabous empêchent leur
dénonciation facile car 80 % des ces actes sont enregistrés dans le milieu
familial. Le problème des enfants X dont le nombre est estimé entre 3000 et
5000/an fait toujours l’objet d’un traitement très discret de la part des
pouvoirs publics, ce qui n’apporte aucune solution.
15 000 enfants présentés
devant les tribunaux chaque année
Il est urgent pourtant de renforcer le traitement de ce problème à ses deux
extrémités : éducation sexuelle en aval et assouplissement des procédures de Kafala ainsi que l’identification ADN systématique des géniteurs
en amont. Le travail des enfants reste un des dossiers les plus lourds dans
notre pays. Le nombre d’enfants qui travaillent de façon permanente et qui ont
abandonné les bancs de l’école dépasse les 350 000.
Des cas de pires formes de travail, même s’ils ne sont pas nombreux, ont été
enregistrés et nécessitent un dépistage systématique comme cela est le cas des
enfants qui travaillent la nuit, qui travaillent dans les sablières, qui
effectuent des travaux dangereux ou qui sont exploités dans les réseaux de
prostitution. Plus de 25% des jeunes ont touché à la drogue et 3 % la
consomment régulièrement.
La situation reste préoccupante, et les efforts déployés sont loin de
correspondre à la gravité du phénomène. 20 000 enfants de la rue sont en
rupture totale avec leur milieu familial devenant, de ce fait, des SDF et ne
bénéficiant que de peu de sollicitude de la part de la société. Le temps libre
des enfants algériens n’est pas pris en charge ce qui fait d’eux des oisifs et
exposés donc aux nombreux dangers sociaux. La famille, l’école, les directions
de la jeunesse et des sports (DJS) et les collectivités locales devraient
s’impliquer davantage pour y remédier car aujourd’hui à peine 2 % d’enfants
scolarisés pratiquent une activité sportive au sein d’un club ou d’une
fédération. Les enfants sont dans la rue pendant une majeure partie de leur
temps, sachant que beaucoup de parents travaillent donc. Les enfants plus
grands suivent les plus téméraires mais aussi les plus déviants d’où leur
implication de plus en plus fréquente dans des actes de violence. Plus de 15
000 enfants sont présentés devant les tribunaux chaque année, impliqués
notamment dans des affaires de violence sur autrui et de vols. Ils sont en
général âgés de 12 à 16 ans. Sur le plan des méfaits de internet, on notera la
mise en place d’un organe de veille et d’alerte».