SANTE-
ENQUETES ET REPORTAGES- GREFFES RENALES ALGERIE 2018
Les
greffes rénales à partir d'organes prélevés sur des personnes décédées devront
commencer l'année prochaine, a annoncé, dimanche 30 décembre 2018, le Pr Tahar
Rayan, un des plus éminents experts algériens en néphrologie, et actuel chef de
service Néphrologie au CHU «Nafissa Laliam» de Hussein Dey. Il a expliqué à la
radio nationale, alors qu'il y a environ 25.000 malades en attente d'une
greffe rénale, que « le gros problème dans l'activité de la greffe rénale,
en Algérie, c'est l'absence de prélèvement sur les personnes décédées.» «Les
greffes, depuis 30 ans, se font dans des donneurs apparentés, et cela
s'explique par la pénurie d'organes », précise-t-il, avant de rappeler que la
nouvelle loi sanitaire du 2 juillet 2018 « portant sur l'activité d'organes, a
tracé un nouvel horizon. J'espère qu'il y aura un virage important dans les
prochaines années, car la nouvelle loi va nous permettre de faire des
prélèvements sur les personnes décédées ». La loi n°18-11du 2 juillet 2018,
relative à la santé, dispose dans son article 362 de la Section 1 (Dispositions
relatives aux prélèvements et à la transplantation d'organes, de tissus et de
cellules humains) que « le prélèvement d'organes ou de tissus humains, à partir
de personnes décédées, aux fins de transplantation, ne peut se faire qu'après
constatation médicale et légale, du décès selon des critères scientifiques
définis par le ministre chargé de la Santé.
Dans ce cas, le prélèvement peut être effectué si la personne n'a pas fait
connaître, de son vivant, son refus au prélèvement. Ce refus peut être exprimé
par tout moyen, notamment par l'inscription sur le registre des refus, tenu par
l'Agence nationale des greffes. Les modalités d'inscription sur le registre des
refus, sont fixées par voie réglementaire.» L'article 363 stipule qu'il est interdit, de révéler l'identité du donneur décédé au receveur et
celle du receveur à la famille du donneur. Le médecin ayant constaté et
certifié la mort du donneur, ne doit pas faire partie de l'équipe qui effectue
la transplantation. Il est interdit de procéder au
prélèvement d'organes ou de tissus, si cela entrave l'autopsie médico-légale.»
Le professeur Rayan explique qu'avant, «il y avait l'obligation de l'accord de
la famille.
La loi actuelle fait du consentement présumé, une personne qui de son vivant
n'a pas mis un avis contraire après sa mort, on ne lui demandera pas l'accord
de sa famille», relève-t-il, avant de souligner que «la notion de consentement
existe, car on demandera toujours l'avis de la famille pour qu'il n'y ait pas
de problème.» Pour le Pr Rayan, «cette nouvelle loi a mis en place le registre
du refus, c'est-à-dire que tous les gens qui ne veulent pas être prélevés après
la mort vont s'inscrire sur ce registre». «Nous avons besoin d'une loi qui nous
couvre pour les greffes rénales», précise-t-il, avant de souligner que « cette
loi protège les donneurs et le cercle est élargi comme le cousin, la belle
famille, les gendres... Cette nouvelle loi permettra d'augmenter le nombre de
greffes rénales à partir de donneurs apparentés ». Le Pr Rayan a expliqué, en
outre, que «le problème des greffes rénales ne se pose que pour ceux qui n'ont
pas de donneurs, et donc cette nouvelle loi a donné un virage très important.»
«Il y a un plan organisationnel qui se met en place, et l'année prochaine on va
annoncer qu'on va commencer la transplantation à partir de personnes décédées».
Selon le Pr Rayan, «il y a eu, cette année, 2 centres qui ont pratiqué plus de
greffes que 14 autres centres. Mais, ce ne sera pas n'importe quel chirurgien
qui pourra faire la greffe rénale, on va passer à l'aspect qualitatif, et non à
celui quantitatif, car on peut faire 1.000 greffes, mais avec des résultats pas
probants.» Sur le nombre de greffes rénales réalisées par an, il a estimé que «
nous sommes dans les mêmes chiffres que les autres pays, on est à 90-95% de
survie après la greffe.» Le Pr Rayan a indiqué, par rapport à la très forte
demande de greffe rénale, que «les enfants sont prioritaires pour les greffes.»
Il explique la méthode de sélection des personnes devant subir une greffe
rénale: «quand il y a des reins sur des personnes décédées, c'est la liste
d'attente qui prévaut, il y a le registre national des personnes dialysées, on
sélectionne les gens qui peuvent être greffées, avec des critères objectifs. Il
n'y a pas de noms, mais des numéros des malades, les enfants sont prioritaires,
et les personnes ayant passé beaucoup de temps en dialyse.» Il a, cependant,
précisé que «le registre prend en compte les patients avec les personnes
vivantes, mais avec les personnes décédées, cela n'a pas commencé en Algérie.»
Il a, d'autre part, expliqué que l'Agence nationale des greffes et le ministère
de la Santé sont en train « de préparer les centres préleveurs d'organes,
c'est-à-dire les 3 centres préleveurs créés par cette agence, soit les CHU de
Blida, de Batna et de Bab El Oued. » Le Pr Rayan a également rappelé qu' « il
n'y a pas de banque d'organes. Il y a des banques des tissus et des cellules,
la conservation se fait, normalement et jusqu'à 48 heures pour les organes ».
Le Pr Rayan a critiqué le recours de certains malades aux hôpitaux étrangers,
avec des frais exorbitants « pouvant aller jusqu'à 7 millions de DA, alors
qu'en Algérie les greffes sont gratuites. » « Elles se font, a t-il dit, exclusivement
dans le secteur public pour éviter les dérapages, et nous avons de meilleurs
résultats que les Turcs.» «Il faut dire, ajoute-t-il, qu'en matière de
transplantation d'organes on a atteint un niveau supérieur à ces pays. »