SCIENCES- DÉCOUVERTE- ARCHÉOLOGIE-
AIN LAHNECH
Travaillant sur le projet «Recherche
sur les anciennes traces de l’existence humaine en Afrique du Nord», une équipe
de recherche paléoanthropologique a fait la découverte de restes lithiques et
fossiles et de galets taillés, de polyèdres manufacturés en calcaire et en
silex et des éclats de bords tranchants… qui remontent à 2.400.000 années
d’histoire.
Travaillant , depuis les années
1990 sur le projet «Recherche sur les anciennes traces de l’existence humaine
en Afrique du Nord», une équipe de recherche paléoanthropologique a fait la
découverte de restes lithiques et fossiles et de galets taillés, de polyèdres
manufacturés en calcaire et en silex et des éclats de bords tranchants…
qui remontent à 2.400.000 années d’histoire. Une découverte qui
témoigne de l’existence d’une des plus anciennes traces de vies animale et
humaine, et ce à Aïn Boucherit,
sur le site d’Aïn Lahnech,
dans la wilaya de Sétif (les résultats ont été publiés fin novembre 2018 par la revue internationale
« Science »).
Des chercheurs issus de
différentes institutions d’Algérie, Espagne, France et Australie en sont les
auteurs. Conduite par le professeur Mohammed Sahnouni,
cette équipe de chercheurs est composée de chercheurs du Centre National de
Recherches Préhistoriques, Anthropologiques et Historiques (CNRPAH) et du
Centro Nacional des Investigación
sobre la Evolucón Humana
d’Espagne (CENIEH) avec la collaboration des chercheurs de Griffith University d’Australie, de l’institut de Paleoeclogia Humana et Evolución Social d’Espane
(IPHES), du Museo Nacional
des Ciencias Naturales
d’Espagne (MNCN), de l’Université de Sétif II, de l’Université d’Alger II et du
Museum National d’Histoire Naturelle de France
(MNHN).
Le gisement plio-pléistocène d’Ain
Lahnech est situé dans la commune de Guelta Zerga à environ 7 km au
nord-ouest de la ville d’El-Eulma et à 30 km de la ville de Sétif. Ain Lahnech est le plus vieux site d’occupation humaine en
Afrique du Nord. Son histoire remonte à 1,8 million d’années, explique le
professeur Sahnouni. Ce dernier a affirmé, lors de
son intervention explicative à cette découverte, que «cette découverte est le
fuit d’un projet de recherche sur les anciennes traces de l’existence humaine
en Afrique du Nord». Quels étaient les caractères physiques et anatomiques des
premiers humains nord-africains ? Dans quel milieu environnemental et
écologique vivaient et évoluaient ces premiers hommes ? Quel était leur mode de
vie ? De quoi se nourrissaient-ils ? Quelle technologie pratiquaient-ils pour
subvenir à leurs besoins ? Quelles étaient leurs capacités biologiques et
cognitives pour s’adapter aux environnements prévalant en Afrique du Nord il y
a plus de 1,8 million d’années ?
Ces nouvelles découvertes à Ain Boucherit
changent quelque peu notre perception de la chronologie et de la diffusion de
la technologie lithique oldowayenne à travers
l’Afrique et l’Europe. Son origine est-africaine semble pour l’instant
clairement établie. Dans cette portion de l’Afrique, de nombreux sites de plus
de 2 millions d’années ont été identifiés, dont les plus anciens à Gona en Éthiopie (2,6 Ma), bien antérieurs aux sites
algériens. L’industrie oldowayenne d’Ain Lahnech, datée d’environ 1,8 million d’années, était
considérée jusqu’à présent comme la plus ancienne d’Afrique du Nord. La
découverte d’outils lithiques à Ain Boucherit
repousse d’environ 600.000 ans en arrière l’arrivée des hominidés dans la
région. Cela suggère soit une dispersion relativement «rapide» (ou du moins,
beaucoup plus rapide qu’envisagée jusqu’à présent) de ce type d’industrie
lithique depuis l’Afrique de l’Est vers l’Afrique du Nord, ou bien même, compte
tenu des marges d’erreur sur les datations, son apparition multiple dans
différentes régions d’Afrique aux environs de 2,5 millions d’années. Quant à
l’assemblage fossile, le professeur Sahnouni explique
qu’il est composé de presque 600 ossements issus principalement d’éléphants,
d’hippopotames, de rhinocéros, d’équidés et bovidés de petite et moyenne
tailles. Certains os présentent des traces de découpes par des éléments
tranchants ou de percussion par un percuteur en pierre. Ce sont là des
activités typiques de dépeçage, d’éviscération ou d’extraction de moelle. Ces
éléments montrent qu’il y a plus de 2 millions d’années, les hominidés avaient
déjà accès aux carcasses animales pour en extraire la viande et la moelle. Un
travail de boucherie a été opéré sur ces os. Ces traces d’activité sont les
plus anciennes découvertes à ce jour sur tout le pourtour méditerranéen. Il
aura fallu plusieurs années d’efforts de chercheurs de plusieurs disciplines
(archéologie, géologie, paléontologie, géochronologie, taphonomie
et archéozoologie) pour que ce travail puisse aboutir à cette
publication.
Il y a lieu de noter, enfin, que ces nouvelles
découvertes à Ain Boucherit, dans la wilaya de Sétif,
témoignent d’un peuplement humain sur la marge sud du pourtour méditerranéen
bien plus ancien qu’au nord, puisqu’il apparaît désormais comme antérieur de
presque un million d’années par rapport aux plus anciennes traces d’industries
lithiques et de fossiles d’hominidés trouvées dans le sud de l’Europe,
notamment en Espagne, à Atapuerca et Orce.