VIE POLITIQUE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH-
ROMAN DJAMEL EDDINE MERDACI- « L’AUTOCRATE »
L’autocrate. Roman de Djamel Eddine Merdaci.
Editions Frantz Fanon , Tizi
–Ouzou
2018, 600 dinars, 173 pages.
Cette fois-çi, le
cadet des Merdaci est allé encore plus loin. Il marie
le polar au politique. Avec une histoire qui nous emmène loin, très loin dans
l’espace et le temps. En Urss.......durant la fin de vie de Iossif
Vissarionovitch Djougachvili
dit Joseph Staline (traduisez « L’homme de fer ») , le maître certes contesté (en silence et dans la peur
) mais incontestable du pays , de ses
habitants, de leurs biens (ce qui leur en restait) et de leur vie. Le « Père des
peuples » ! Le « cadeau de la Providence» que nul
,dans toute l’Urss, n’aurait l’audace de trouver à redire.
Cadre de l’intrigue : le Kremlin.....et une grande chambre
désaffectée « qui sonnait creux », une chambre au mobilier rare.....une chambre aussi vaste que
tout un hangar.
Et, un homme qui broyait du noir, ayant perdu
de sa superbe en vieillissant et se refusant à l’admettre.....et voyant des
« ennemis » partout. Le plus dangereux, Lavrenti Pavlovitch, l’Abkhaze,
dit Beria dit Œil de lynx dit Le Butor ? Car, son protégé, son
chien de chasse et de garde a la
haute main sur la police
politique..... .Beria ? un
autre « Himmler » , « espion, tortionnaire,
bourreau, assassin, tueur désincarné et de sang froid, créature des ténèbres,
le diable en personne, Belial, Satan
Belzébuth.. » .Il ya , aussi, aussi ,
tous les autres « ennemis », même les deux petites souris
venues d’on ne sait où (un coup de Beria, sans nul doute ? ou, une simple
farce de vieillard ,mais bien dangereuse pour les chargés de la
sécurité ?), dans sa chambre, réveiller ses peurs d’enfant ayant grandi
dans un presque taudis.
Autre
grand problème. On venait de lui subtiliser, de son propre bureau, Sa
Pipe (offerte par Churchill en 1945 à Yalta) et son Stylo (offert par Roosevelt) . Du moins
l’affirmait-il ! Le coupable est à trouver et Beria doit s’en
charger.......Un piège ? Car, en fait, la pipe est vite retrouvée par
l’autocrate devenu sénile et le stylo , pris par
inadvertance ( ?) par ........Krouchtchev, est,
lui aussi, de retour . Entre-temps , les choses
politiques s’accélèrent.......Staline meurt subitement (alors qu’on (et il se
croyait) le croyait éternel) après avoir tiré son ultime baroud
d’honneur...avec un repas fastueux. Des perdants (Beria en tête , lui qui se
voyait déjà comme successeur à la tête de l’Urss, oubliant qu’il n’était qu’un
homme de l’ombre et des abysses et qui, s’il s’avisait de sortir au grand jour, se brûlerait les ailes.....) et des gagnants
(Krouchtchev......et les apparatchiks serviles, fidèles de tous les tyrans qui, après avoir
adoré le Père des peuples , vont très vite aduler l’homme de Koursk dit
« le Forgeron », un homme qui connaissait un bout sur les arcanes de
la politique ).....Mais que de dégâts et que de crimes commis ......pour
conquérir et garder le pouvoir.
L’Auteur :
Journaliste,
critique de cinéma à la longue expérience (parmi les plus éclairés) , ayant participé à la plupart des grands festivals à
travers le monde.....il est, aussi, scénariste et auteur de films. Déjà auteur
de plusieurs romans : « L’impasse du Maltais », son premier-né,
un polar brut de brut (
présenté in Mediatic du 18 octobre ) et
« L’Allée des Dames » (présenté in Mediatic
le 6 mars 2014).
Extraits : « Il
(Staline) avait endossé le costume taillé sur mesure du légendaire stratège
militaire. Le tout sans avoir tiré lui-même un seul coup de feu. Il avait
laissé un tel soin à d’autres que lui » (p 11), « Il
était des recoins obscurs de l’âme tourmentée du despote auxquels nul humain ne
pouvait aisément accéder : ils étaient verrouillés à double tour » (p
20), « Il avait beau être un despote, il n’avait pas le pouvoir de
commander à la longévité (p 46), « Le dictateur n’avait pas eu le moindre
souci de la morale ....Il n’avait en tête que sa propre réputation. Pour cela , il ne lui importait que très peu de sacrifier un
pion. Au contraire, cela lui permettait de jouer au redresseur de torts (p 78),
Avis : L’Urss
est si loin....et son histoire si étrangère (les voies de l’écriture est si
impénétrable !) ....et pourtant, tout le livre ,
un bien étrange livre, est plein d’enseignements ! Surtout qu’il est bien
écrit : Précision des infos et clarté de l’écriture. Que demander de plus
à un roman historique sur un pan de l’histoire d’un pays ....qui nous
a , politiquement, beaucoup influencé (jusqu’à
l’imitation......en politique , en économie, en défense....et en gouvernance)
Citations : « Le despote ne voulait pas voir une seule tête qui puisse
s’élever au-dessus de la sienne, il ne voulait pas non plus entendre une voix
qui puisse porter plus haut que la sienne » (p 24), « Ah, la
révolution : une fois faite, les révolutionnaires faisaient vite d’oublier
leurs promesses. Ils n’avaient en tête que le souci de s’éliminer cordialement.
Ou celui de s’enrichir » (p 25) , « La première chose que
faisaient les nouveaux despotes était de s’installer dans les meubles, dans le
lit du roi. Ils adoptaient le mode de vie du souverain » (p
57), « La nomenklatura grouillait de personnages peu recommandables
et habiles à nager en eaux troubles » (p 169)