TOURISME-
ENQUETES ET REPORTAGES- MAOUI ABDELAZIZ,ANCIEN MINISTRE- ARTICLE SAID BOUKHELIFA /LEQUOTIDIEN
D’ORAN (EXTRAITS)
(c) Par Saïd Boukhelifa - Opérateur et
expert en tourisme 1975-2018 - Président du SNAV
Maoui Abdelaziz vient de nous quitter ce
vendredi 26 octobre 2018 dans un anonymat total ; la presse n'a pas évoqué ni
sa disparition, ni évoqué son parcours exceptionnel et historique. Il fut le
plus grand ministre de l'histoire du tourisme depuis 1962.
Saïd Boukhelifa, expert en tourisme, le connut comme son ministre de tutelle.
Il nous en parle .........
Qui était vraiment Abdelaziz Maoui ?
...........il fut chargé par Houari Boumediene de diriger ce secteur économique
important de 1965 à 1977, soit douze années. Durant la révolution, il fut
instructeur à l'école des cadres de l'ALN, créée par Boussouf, patron du MALG.
Le directeur était Laroussi Khalifa, futur boss d'Air Algérie et du secteur des
transports à l'indépendance. Parmi les stagiaires dans cette école, un jeune,
Abdelaziz Bouteflika (formation de contrôleur) et un certain Toufik M. .
Quelle fut son oeuvre essentielle ?
Son œuvre colossale fut la construction de stations balnéaires d'est en ouest
et d'une belle série d'hôtels dans les Oasis (Erg oriental et dans la Saoura
(Erg occidental), le tout dans une architecture inédite qui fit l'admiration
des plus grands architectes du monde. Grâce à l'apport et l'implication de
Fernand Pouillon, un architecte de génie. Ainsi, un essaimage de structures
d'hébergement furent ouvertes à El-Kala, El Mourdjane 4*, le Plazza
international (Seybouse), 5*, Annaba, Le Rocher (El Mountazah) Seraidi ,4*,
Essalem Skikda ,4*, Chelia 4*, Batna, El Hidhab 3*Setif, El Minzah Moretti 4*,
Le Port (El Marsa)4*, El Riadh 4*, El Manar 3*, les trois à Sidi-Fredj,
auxquels il faudrait rajouter la marina, port de plaisance, le centre de
vacances, et le fameux restaurant Le Vivier (où le poisson vivant était servi
après avoir été prélevé dan un vivier special, à l'intérieur de ce
restaurant.), Le Sables d'Or Zeralda 4*, le Mazafran 3*, le Centre européen de
tourisme (Club Med) 4*de Tipasa, le complexe de Tipasa -Matarésh, hôtel La baie
4*(dans lequel la reine Elisabeth en compagnie de Chadli Bendjedid dejeuna le
25 octobre 1982, après avoir visité les ruines romaines), l'hôtel Résidences
3*, plus des bungalows. Enfin, à l'Ouest, le complexe des Andalouses Oran, qui
fut inauguré le 16 juin 1973 par le président Boumediene.
Quand on investit dans la pierre, on doit investir dans l'homme. Maoui pensa à
la formation. Il fit ouvrir les instituts de Boussada et de Tizi-Ouzou en 1971,
puis celui de l'Aurassi, en 1976, pour les managers et encadrement supérieur.
Et il fit envoyer toute une kyrielle de jeunes se former à Beyrouth
(1968-1970), Paris (67_68),Vichy(70-71), Thonon-les Bains(1970), Torino (1970),
Munich (1968-1970) etc.
Quand la construction des hôtels fut terminée et la formation entamée, il fit
ouvrir des représentations de l'ONAT afin de faire connaître la destination
Algérie, à Frankfurt (RFA), Stockholm (Suède) qui nous avait valu des charters
de Scandinaves, les descendants des Vikings qui séjournaient à Moretti et à la
Madrague. Ainsi, des Suédoise et des Danoises allaient danser le samedi soir au
night Blue Note de la rue Didouche Mourad, Alger. Et à Londres, Paris et
Bruxelles des bureaux furent également ouverts pour faire la promotion.
Il était entouré par quels hommes ?
Par des coopérants techniques comme Michel Daviaud, et Annick Garnier, mais par
beaucoup de nationaux, à l'image de Abdelkader Khalef, DG ONAT, qui, sur le
terrain suivait le chantier monumental de la construction des hôtels sahariens
et complexes balnéaires. Ce dernier fut le président de la JSK (100%kabyle) et
le fondateur du Jumbo Jet ! Kaid-Hammoud, DG Sonatour, Abderrahmane Berrouane
DG ATA, Belgreine Bouhadjar, DG des complexes de Tipasa, Cherif Rabhia DG ETT
(entreprise des travaux touristiques), Hafida Mansour-Chaouch, la pionnière,
chargée de la promotion, etc.
Les résultats de cette politique touristique, investissement, formation,
promotion ?
Entre 1973 et 1978, tous nos hôtels balnéaires étaient complets six mois à
l'avance par les réservations des grands tour-operators européens
(Neckerman-RFA, n° 2 en Europe, Thomson Holidays (GB) n° 1 en Grande-Bretagne,
les agences françaises, Cosmovel, Transtours, Soleil Voyages, Grandes Vacances,
Climat, les agences belges, et hollandaises, Sunair, Transair, etc. Nos hôtels
du sud étaient également pleins six mois à l'avance pour les vacances d'hiver
et de printemps, à travers les circuits de la boucle des Oasis et celui de la
Saoura. Nos expéditions dans le Hoggar et dans le Tassili full trois mois à
l'avance!
Nous travaillions de jour comme de nuit, car les charters bondés de touristes
arrivaient en nocturne à Dar-El Beida.
Et ce travail nous plaisait beaucoup, car voir cette foule cosmopolite, belle
et parfumée, arriver souriante, parlant des langues différentes. Il faisait bon
de faire un tour dans nos complexes touristiques, où régnait une ambiance
internationale.
Et l'ambiance touristique dans les grandes villes ?
Je parlerai d'Alger où je vivais. Les restaurants étaient pleins de touristes,
on y servait librement «l'assiette anglaise» (jambon) et le civet de marcassin.
Les restaurants étaient ouverts durant le ramadhan, les étrangers y mangeaient,
ainsi que des Algériens. La liberté de culte, le vivre-ensemble, le respect
d'autrui, Alger était vraiment méditerranéenne,!
La capitale était assez propre, les taxis corrects. Beaucoup de bars ouvraient
jusqu'à 23h et ils étaient nombreux, des dizaines. 90% ont été obligés de
fermer cette dernière décennie (quand le père décède, les héritiers se voient
refuser le renouvellement de la licence autorisant la vente d'alcool.
Que pensez-vous de la situation actuelle ?
Sur le plan réceptif, du tourisme international, c'est une catastrophe, le
balnéaire, il faut l'oublier à jamais à l'endroit des étrangers, qui ne
viennent plus pour nos plages depuis 1990. Ils vont vers les autres pays de la
Méditerranée (au nombre de vingt). Il ne nous reste plus que le tourisme
saharien, où la culture touristique existe encore et qui a disparu au Nord
depuis une trentaine d'années. Ensuite le tourisme culturel avec nos 21 sites
romains, dont la majorité demeurent méconnus, à part Tipasa, Djemila, Timgad,
Hippone. L'Algérie est la deuxième destination mondiale en termes de vestiges
romains, après l'Italie, l'antique Rome.
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