HABITAT- VILLE- TLEMCEN – MONUMENTS
(c) Mohamed Medjahdi/Horizons,3 juin 2018
L'une des chances de Tlemcen, est d'avoir
conservé de son glorieux passé une série de très beaux monuments, des mosquées
surtout, rappelant « le peuple industrieux qui, avant l'arrivée des corsaires,
avait fourni des architectes à l'Alhambra », aux monuments de Séville et de
Fès.
Que de trésors d'art musulman ont été
accumulés dans les enceintes de ces vieux remparts en pisé dont les pans de
murs et les tours de flanquement attestent la solidité et sont d'un si
pittoresque effet avec leur ceinture de verdure et de jardins!
On a dit que la première Mosquée de
Tlemcen fut fondée, par Idris I, en 790, à Agadir et que la Grande Mosquée de
Tlemcen date de 1136. Mais toutes deux furent agrandies et dotées de hauts
minarets, que l'on admire encore, vers le mi1ieu du XIIIe siècle.
Les plus beaux monuments que l'on
visitera à Tlemcen sont du XIIIe au XVe siècle, à l'époque où cette ville était
la capitale du Maghreb central et la rivale de Fès, la Mérinide.
Les uns sont dus aux rois de Tlemcen et
ceux-là, à l'exception du minaret d'Agadir (XIIIe s.) et de la petite Mosquée
de Sidi Lahcene (près de Sidi-1-Haloui)
datant du XVe siècle, implantés dans la ville à l’image de la Grande Mosquée
(XIIe et XIIIe s.), Mosquée de Sidi Belahcene (Musée
actuellement) fin du XIIIe s.), Mosquée d'Ouled El
Imam ( du XIVe s.), Mosquée du Méchouar, Mosquée de
Sidi Senoussi (XIVe s.), Mosquée de Sidi El Benna (XVe s.)… sont les
principales. Les autres sont l'œuvre des deux rois mérinides, maîtres de
Tlemcen, au milieu du XIVe siècle. Il s’agit d’El Eubbâd
à savoir la mosquée et ses dépendances (1339), Médersa (1346), Palais du Sultan
(très ruiné, date imprécise) et ceux de Sidi-1-Haloui
(Mosquée et dépendances 1353),les imposantes ruines de Mansoura (XIVe s) dont
on ne vantera jamais trop la subtilité du décor et la majesté de l'ensemble du
minaret en pierre de taille (les autres minarets sont en brique) rappelant les
minarets almohades de Rabat (Tour Hasan), de Marrakech (Koutoubiya),
de Séville (Giralda).
Cette époque du XIIIe-XIVe siècle
correspond à la période classique du style architectural hispano moresque. La
décoration intérieure des beaux édifices publics et privés, religieux et
civils, était faites, dans une des Médersas mérinides
de Fès, dans les revêtements des murs. A la base des murs, dans les édifices
privés et les Médersas surtout rarement dans les Mosquées
,sont des lambris de faïence, aux combinaisons multiples d'émaux
polychromes. Au-dessus de ces lambris se développent les arabesques florales,
épigraphiques ou géométriques des plâtres sculptés comme de la dentelle,
jusqu'aux corniches des bois sculptés et quelquefois peints, soutenant les
plafonds.
Ceux-ci sont en cèdre sculpté et peint,
comme à la Mosquée de Sidi El Haloui, à celle de Sidi
Belahcene (Musée) et dans la salle principale de la
Médersa d'El-Eubbad, ou bien en plâtre à entrelacs
géométriques.
Les coupoles des « Mihrab » (au milieu de
la face sud des Mosquées) sont en plâtre à stalactites, comme aussi la voûte
des porches (Mosquée de Sidi Boumediene et la coupole de la travée précédant le
Minaret de Mansourah. Le bois de cèdre a servi aussi à faire des, venteaux de
portes, et des grillages en moucharabieh et en assemblage de planchettes
sculptées et peintes.
A Tlemcen, le décor en faïences
polychromes pour les revêtements des murs des salles et du patio a presque
complètement disparu durant les années 1830 à l’image des vestiges du Palais du
Sultan). Il devait cependant exister à la Médersa d'El-Eubbâd
et dans quelques autres palais. On en a retrouvé d'importants vestiges à la
Médersa Tachefiniya (ils sont en partie au Musée ), dans le palais de la Victoire (tous, disparus) et à
la Mosquée de Mansoura (simples débris) par exemple.
Lustre architectural
Le marbre onyx, jaunâtre et translucide,
abondant dans la région tlemcenienne encore
aujourd'hui a donné des fûts de colonne, des chapiteaux d'une robuste élégance
et de ce type particulier aux Mérinides dont le Musée de Tlemcen donne tant de
spécimens ainsi qu’au niveau de la Mosquée de Sidi El Haloui,
Mausolées, Mosquée Sidi Bel-Lahasen…). On en faisait
aussi des carreaux pour le pavage de l'atrium des Mosquées et des Médersas, des
vasques et bassins à ablutions, des dalles murales donnant des inscriptions de h’bous, des stèles funéraires … Le bronze a servi à faire
des lustres de Mosquées, des heurtoirs et placage de vantaux comme à la porte
De là de Sidi Boumediène;
ce plaquage, ainsi que le lustre de la Grande Mosquée, ont été reconstitués par
l'artiste tlemcénien Si Mohammed Benkalfate.
Dans les Mosquées de la bonne époque on remarque l'élégante silhouette,
l'harmonie des proportions et le classique décor des minarets quadrangulaires
en brique. La décoration des quatre faces est obtenue par des réseaux de
briques en saillie sur le plan du fond. Assez souvent, des faïences polychromes
semées discrètement donne une note brillante et
heureuse sur le fond mat et monochrome de la brique nue (minarets des rois de
Tlemcen et celui de Mansoura qui est en pierre de taille); Parfois, comme à
Sidi Boumediene, à Sidi El Haloui, de larges frises
de mosaïque de faïences formant des polygones étoiles couronnent le minaret
au-dessous des merlons.
Dans toute mosquée de cette époque, il y
a une partie de la salle principale de prière qui est très décorée ; c'est le
mihrab. Véritable splendeur des mosquées de Sidi Bel Lahcene
et la grande mosquée, qu’on ne trouvera nulle part, ni au Maroc ni en Espagne.
Mais si l'on s'attarde un peu ici à
travers les monuments des XIIIe et XIVe siècles, il n'en manque pas d'autres
qui pour ne pas appartenir à l'époque classique, sont eux aussi curieux et
intéressants. Ce sont, par exemple, les nombreux sanctuaires et mausolées qui
dans la ville et hors ville abritent le tombeau de quelque Saint. Ces édifices
sont Sidi Yakoub et surtout Sidi Boumediene considéré
comme étant le plus riche et le plus curieux de tous puisqu'il abrite, depuis
1197, le corps du grand Patron de Tlemcen, ou ceux des Sidi Yakoub,
Sidi Daoudi, Sidi Brahim, de Lalla Setti, ….
Ce sont ces blanches coupoles qui
couronnent un petit monument, ces toits de tuiles vertes de tel ou tel blanc
sanctuaire, qui dans notre ciel bleu, dans la verdure dorée de notre paysage tlemcénien, donnent leur note de couleur locale éclatante
et si heureuse de ligne.
Ils nous rappellent que sous ces bouquets
de vieux oliviers, de térébinthes séculaires, vif une population fidèle aux
croyances de ses pères et qui/ dans son existence paisible n'oublie pas
d'offrir aux divinités de ces lointaines ancêtres l'hommage fervent de son
inébranlable foi.