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Récit Khider Ouahab- "Skikda......Tome I"

Date de création: 09-07-2018 11:54
Dernière mise à jour: 09-07-2018 11:54
Lu: 2255 fois


HABITAT- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- RECIT KHIDER OUAHAB- « SKIKDA.....TOME I »

Skikda.Fragments de mémoire (Tome I). Récit de Khider Ouahab (Préface de Belkacem Ahcene-Djaballah) . Editions Rais,  Skikda,  2018, 1 200 dinars, 142 pages.

 

Ce n’est pas un ouvrage destiné à orner les bibliothèques, ou à offrir seulement, même si la présentation  paraît quelque peu recherché (photos couleurs, papier de qualité...). C’est plutôt un ouvrage à valeur socio-historique .

L’auteur, journaliste correspondant depuis assez longtemps d’un quotidien francophone, enfant de la région, s’est,  peu à peu, au fil du temps et des nécessités de son travail,  plongé dans les profondeurs de la société, de la ville et de la  campagne. Ce qui n’est pas une mince affaire dans une région tout de même assez pudique sans être conservatrice, mémoriellement difficile à « décoincer »  bien que très accueillante. Un peu exubérante certes, mais seulement verbalement .

Donc, dans ce premier tome, il s’est penché sur le patrimoine socio-culturel tout en n’omettant pas de citer les moments historiques forts qui ont  influé sur  la vie de la ville et de ses habitants.Cela va de la région et de ses pratiques, aux aventures humaines et les spécificités agricoles en passant par des moments forts et des lieux emblématiques
D’abord la religion :

Sidi Ali Dib (et non El Adib comme voudrait l’imposer depuis quelques années une  « Administration » arabiste) , un homme de religion et de paix, décédé bien avant 1838, et sa mosquée située en plein centre de la ville et autour de laquelle se développera le quartier arabe (« Zkake Arab »). Un homme venu des montagnes de Kabylie bien avant l’invasion coloniale française.....et que la mémoire skikdie conserve avec respect malgré les tentatives salafistes et para-salafistes  pour déformer  l’histoire  religieuse de la ville .

Ben Aroua, aux « prédictions troublantes », qui a vécu dans la région d’El Hadaiek (à 6 km de la ville). Les vieilles générations en parlent encore avec respect (je crois même avoir entendu une chanson pop’ sur lui dans les années 80)....Les  colons ( excepté les Maltais qui lui vouaient un grand respect) le craignaient tellement qu’ils l’emprisonnèrent à Skikda puis le déportèrent   durant plusieurs mois  à Ouargla  . Revenu au « pays »,  il continuera ses prédictions....toutes appréciées par la population.  Surtout celles annonçant le départ des colons. Décédé au début de l’année 1940 (?).

On a , aussi, l’école libre El Fath (années 40-50) de Ali Sid (décédé  fin 62) , ancien du Ppa puis du Mtld , un altruiste qui ouvrit des classes de cours aux jeunes skikdis (Ali et Ahcène Kafi  y enseignèrent ) , garçons et filles ; la Médersa El Irchad créée au début des années  1940 à l’image  de ce que faisait l’association des Ulémas de Constantine; la Zaouia de « Zkak Arab » dont l’histoire remonte à 1900.....

Ensuite, les lieux emblématiques :  Dar Meriem, un joyau architectural construit par un sénateur- maire amoureux fou (Paul Cuttoli)  de sa Marie (Mathilde Bordes)  ramenée du Paris artistique des années 1900 /   La Place centrale (du 1er Novembre) , ancien forum romain,  faisant face à la mer et lieu de promenade et de concerts /   Drouj Skikda (plus d’une vingtaine d’ escaliers aux appellations inédites, pour certains d’origine romaine,  que la mémoire collective entretient précieusement , car  la ville est bâtie sur deux  flancs de côteaux de part et d’autre d’un thalweg occupé par le grande avenue  centrale. Des pentes allant de 5 à 25 %) / Hammam Tarfaya, le bain maure aux eaux provenant de citernes romaines/  La piscine (ex-Jeanne d’Arc, lieu de gloires sportives et de champions  o mais, hélas , repaire des parachutistes et des mercenaires de l’armée coloniale durant la guerre) / Les cafés  comme Kahouat Belloukil emplie de fresques dessinées en 1938 / L’île de Srigina et son phare  , face à Stora à 3 km à l’Ouest de la ville  ,  grain de beauté esquissé dans le cœur des vagues plaisirs/ L’île de La Figurine (2,7 ha, toujours au large de la côte Ouest).....

Enfin, des événements douloureux comme l’attaque sauvage des tirailleurs Sénégalais le 25 juillet 1943 qui fit 37 victimes Algériennes (déclarées par le colonisateur)  ; l’histoire du rescapé de Cayenne, Boukhobza Mohamed ...qui vécut jusqu’à 109 ans après s’être échappé du bagne en 1944 (déporté en 1921). Il sera envoyé, à l’âge de 103 ans,  à La Mecque en 1984 par la ministre Zhor Ounissi ...  et l’aventure singulière d’Antonin le Pieux ....une statue haute de 2,10 m , façonnée en 213 en marbre de Fil Fila et .......seule rescapée d’un ensemble de 19 statues qui ornaient le Forum de l’antique Rusicade.

Et, ne pas oublier la fraise de Skikda, la Mkerkeba (la rondelette) , introduite en 1890 par des familles italiennes immigrées sur les hauteurs de Oued Chadi jusqu’à la Grande Plage....au parfum inégalée et ne se retrouvant nulle part ailleurs.Car, « on aura beau essayer de la repiquer ailleurs, elle s’est de tout temps refusée pour ne donner ses fruits que sur les versants marins allant de Stora à Ain Zouit.... Bon appétit......... et bonne lecture !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’Auteur :  en 1962 à Sétif . Diplômé du Centre d'études et de recherche de Constantine. Diplôme d’aptitude d'enseignement. Enseignant de 1983 à 1999. Journaliste à El Watan, chef de bureau de Skikda de 2000 à nos jours.

Animateur d’ateliers de photographie ( années 1990 et 2010). Organisateur de plusieurs salons nationaux de photographie 

 

Extrait : « Rusicade, ancien comptoir phénicien fondé durant le premier millénaire avant J-C....puis Fort de France......puis Philippeville –jusqu’en 1962- , mais toujours Skikda pour ses habitants et pour la quasi-totalité de la population musulmane de la région et du pays........Une forme de résistance citoyenne ! » (Belkacem Ahcene-Djaballah, préface, p 6)

Avis : Un livre bien construit ,   bien documenté ,bien illustré ,  très accessible qui devrait être imité par beaucoup d’autres journalistes correspondants qui sont (et ont été) les plus et les mieux informés sur l’histoire contemporaine et les patrimoines de la région « couverte »

Citations :  « Les escaliers sont pour Skikda ce que sont pour Venise ses gondoles. Incontournables ! » (p 74),