HISTOIRE - BIBLIOTHEQUE D'AL MANACH - LIVRES - ROMANS ET NOUVELLES
AICHA ET LES AUTRES NOUVELLES FANEES. Pour ne jamais oublier Novembre. Recueil de nouvelles de Abderrahmane Chergou (avec une préface du Dr Y. Khatib, colonel Hassan, dernier chef de la wilaya IV). Lazhari Labter éditions. Alger 2013. 229 pages, 500 dinars
Déjà, de son vivant, lorsqu'il écrivait dans la presse, bien que ses idées étaient dérangeantes pour beaucoup (ceux qu'il dérangeait le plus l'ont assassiné, intolérants et peu habitués à la liberté d'expression), son style et son engagement remuaient, tant la sincérité était grande, tant sa «vérité» était vraie.
Toujours engagé politiquement et sur tous les fronts, il avait oublié lui-même qu'il avait un talent d'écrivain.
Un bijou que cet ouvrage (en fait le second) ! Qui mériterait d'être «exporté» en France (et ailleurs) afin de faire connaître les réalités du combat contre le colonialisme. A travers les 13 histoires réelles ou «arrangées», parfois «incroyables» (et, pourtant, certainement, en grande partie vraies) l'auteur a pu restituer, au détail près, des situations, des événements, des émotions, des drames, des douleurs, des odeurs même qui rendent encore plus vivante aujourd'hui la Révolution armée algérienne. A travers la vie de tous les jours : des combattants, des héros anonymes, des femmes, des enfants, des vieillards, des animaux
On (re-) vit les moments décrits tant la restitution est correcte et prenante, remuant bien des souvenirs de notre enfance que l'on croyait oubliés. A en pleurer quand on sait que ne le liront que les quinquas francophones et plus et, qu'en l'absence d'une politique nationale de traduction, des centaines de milliers de jeunes ne le liront pas et ne sauront pas les prouesses guerrières et de résistance des aînés ou de leurs parents. Quelle misère qu'un peuple cultivant l'inculture, les ragots et les infos de caniveau!
Avis : Nouvelles fanées ? Pas du tout. De l'émotion plein les pages. Attention aux larmes, car, bien que ce soit des nouvelles, la réalité est là, bien vraie. La guerre de libération comme elle n'a jamais été racontée. Un seul héros, le (petit) peuple !
Extrait : «Ces petites perles de nouvelles donnent à voir le côté jardin de l'ALN, celui qu'on ne trouve pas beaucoup dans les témoignages et mémoires de djounoud et responsables. L'ALN y est présente, mais les arrière-fonds
.» (p 9, préface) «Quand on sait que demain sera meilleur, aujourd'hui est toujours supportable quel que soit le malheur qui l'habite» (p93), «Les hommes se sont trop enfoncés dans la guerre et d'aucuns pensent, sincèrement, que parler de paix c'est une forme de défaitisme, d'abandon, en tout cas un risque de ne pas prendre en charge totalement les nécessités de la guerre qui continue. Ils s'imaginent même qu'ils laboureront demain et construiront routes, écoles et maisons à coups de rafales de mitraillettes» (p157)