CULTURE – MUSIQUE – DAHMANE EL HARRACHI
De son vrai nom Abderrahmane Amrani est né le 7 juillet 1926, dans l’un des quartiers les plus connus d’Alger, à El-Biar précisément. D’origine chaouie, ses parents originaires du village Djellal de la wilaya de Khenchela, s’installent à Alger en 1920 où son père devient le muezzin de la grande mosquée, c’est un élément biographique qu’il faudra prendre en compte dans les influences religieuses et moralistes que contiennent un bon nombre de chansons. Benjamin d’une famille de onze enfants, la famille du jeune Abderrahmane déménage souvent : de l’ex- rue Maret à Belcourt, elle va se fixer à El Harrach, dans la banlieue algéroise où le jeune adolescent passera toute sa jeunesse.
C’est d’ailleurs en souvenir de son quartier qu’il prend le pseudonyme de Dahmane El Harrachi. On sait que le jeune Dahmane dévoile son penchant pour la musique puisqu’il fabriquait lui-même ses «guembers» avec un manche à balai et une boîte de conserve mais comme le veut la tradition algérienne, il suit une précieuse formation à l’école coranique et obtient son certificat d’étude avant d’opter pour un temps pour le métier de cordonnier puis de s’orienter dans les transports publics en devenant receveur de tramway sur la ligne Bab el Oued-El Harrach, histoire de gagner ses propres sous. Mais il a vite fait de déchanter avant de céder aux démons de la musique avec toutefois cette différence : en bourlinguant de quartier en quartier, il observe d’un regard pétillant de curiosité avec un esprit pénétrant de vérités les beautés et les travers de la société algéroise qui l’inspireront plus tard pour l’écriture de ses chansons quand en véritable professionnel, il sillonne avec d’autres musiciens et chanteurs le territoire national.
Sa collaboration étroite avec des artistes de renom —après qu’il se soit senti fortement influencé par le chanteur Khelifa Belkacem décédé en 1951 alors qu’il a tout juste seize ans — tels que Hadj Menouar, Cheikh Bourahla et d'autres lui vaudra une solide formation puisqu’il accompagne au banjo le grand Cheikh El Hasnaoui pendant une bonne période, on sait à ce sujet qu’il se produit avec ce dernier pour la première fois à Paris, rue de Charonne, au Café des artistes. La France justement, où il s’est exilé à partir de 1949 à Lille puis à Marseille et connait ses premiers concerts avec des textes et une musique bien à lui et où surtout, il commence à attirer vers lui la communauté maghrébine en créant avec un nouveau langage et cette voix rocailleuse très masculine un chaâbi taillé sur mesure.
La gloire ne tarde pas à arriver, lui qui sait parler au public dans un parler métaphorique pourtant proche de la rigueur morale, chante à un auditoire conquis les expériences de son vécu et à l’image de tout un chacun, des souffrances de l’exil, des déboires sentimentaux, de l’amitié et la trahison, de la beauté des femmes, de la malhonnêteté, la mauvaise foi, l’ingratitude mais évoque surtout lorsqu’il enregistre son premier disque chez Pathé Marconi en 1956 alors que la guerre de libération faisait rage, son fameux titre Behdja bidha ma t’houl (Alger la blanche ne perdra jamais de son éclat). Découvert sur le tard par la nouvelle génération, il se produit officiellement en public qu’en 1974 à la salle Atlas. A sa disparition survenue le 31 août 1980 dans un accident de la route à Ain Benain, il laisse trois enregistrements à la télévision algérienne et le souvenir de sa longue silhouette dans le téléfilm Saha Dahmane (Salut Dahmane) où il campe son propre rôle dont il venait tout juste de terminer le tournage.
Durant les années 90, Rachid Taha (Chanteur beur de France) reprend , ré-adapté avec un rythme plus jeune , certaines de ses chansons et va leur permettre de faire le tour du monde avec un succès jamais égalé
Par ailleurs , son fils Kamel El Harrachi continue de faire revivre l'immense répertoire de son père