COMMUNICATION- FORMATION CONTINUE- INFORMATION/SOURCES
© Pr Ahmed Cheniki, Fb, 12 octobre 2025
On évoque fréquemment l’« absence de sources
», comme si celles-ci devaient être livrées, prêtes à l’emploi, au journaliste.
Or, la source n’est pas une matière inerte, figée ou simplement informative.
Elle est souvent un espace symbolique, un adjuvant possible, un élément actif
dans la quête de sens. Elle participe à la construction du récit, à
l’élaboration du regard, à l’orientation de l’interprétation. Elle est, en ce
sens, une composante essentielle du travail journalistique.
Il devient presque anormal aujourd’hui de parler de journalisme- et
cela ne concerne pas uniquement l’Algérie, où toute forme de polyphonie semble
absente, laissant place à un discours monologique-, mais également certaines
grandes rédactions à travers le monde.
Dans de nombreux cas, la diversité des voix, des points de vue, des
récits, tend à s’effacer au profit d’une ligne unique, d’un récit dominant.
Certes, des résistances existent encore, portées par des sociétés de rédacteurs
soucieuses de préserver l’éthique du métier, comme à la BBC, au Washington
Post, ou encore dans certaines rédactions japonaises. Mais ces résistances sont
de plus en plus fragiles, confrontées à des logiques de contrôle, de formatage,
voire de censure douce.
La quête de polyphonie, pourtant fondement du pluralisme et de la
démocratie médiatique, semble aujourd’hui reléguée au second plan. Même les
grands médias, contraints par des impératifs économiques, politiques ou
réglementaires, se voient parfois réduits à en donner l’illusion. Ils recourent
alors à une figure censée incarner un discours alternatif, une voix dissonante,
mais dont la fonction est avant tout décorative : elle permet de cocher la case
du contradictoire, d’éviter les sanctions des instances de régulation, sans pour
autant remettre en cause l’architecture du discours dominant.
Dans ce contexte, le journaliste devrait retrouver le sens de sa
mission première : s’informer par lui-même, aller vers la source qu’il juge
pertinente pour son enquête ou son reportage. Il ne devrait reprendre aucune «
information », d’où qu’elle vienne, quelle qu’en soit l’origine, sans
l’interroger, la confronter, la mettre à l’épreuve. Il lui faut savoir être
impertinent sans être irrespectueux, exigeant sans être arrogant. Il doit être l’otage
de sa conscience, et d’elle seule.
Tout est à interroger. Il n’existe pas d’argument d’autorité, pas
d’instance infaillible, pas de vérité livrée clé en main. Le journaliste ne
doit rien à personne, sinon à la rigueur de son propre travail. Le reste, il
n’en a cure.
La source, loin d’être neutre, est le lieu d’articulation du discours
journalistique. Elle est ce point de départ - ou d’arrivée-où se nouent les
enjeux de sens, de vérité, de responsabilité. Le journalisme, c’est l’écrit,
l’image, leur justesse. Mais c’est aussi, et surtout, la pluralité des sources.
Leur diversité, leur confrontation, leur mise en tension : c’est cela qui crédibilise
le travail du journaliste, qui lui donne sa densité, sa légitimité, sa portée.