Nom d'utilisateur:
Mot de passe:

Se souvenir de moi

S'inscrire
Recherche:

Roman Tahar Djaout - "Les chercheurs d'os"

Date de création: 10-10-2025 18:54
Dernière mise à jour: 10-10-2025 18:54
Lu: 2 fois


 

HISTOIRE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN TAHAR DJAOUT- « LES CHERCHEURS D’OS »

Les chercheurs d’os. Roman de Tahar Djaout. Editions Quipos, Alger 2014 (Le Seuil, 1984). 174 pages, 900 dinars

 

L'Algérie au lendemain de son indépendance. Les habitants d'un petit village kabyle décident de rechercher les dépouilles de ses combattants, tombés un peu partout au cours de la guerre de libération, pour les réenterrer chez eux. Accompagné de Rabah Ouali, un de ses parents, un adolescent se joint à un convoi de « chercheurs d'os », pour tenter de retrouver les restes de son frère aîné. Il va se heurter à un univers nouveau, découvrir la ville, la solitude au sein des foules, leur indifférence cruelle.

C'est la première fois qu'e ce jeune homme sort -pour la première fois - de sa montagne kabyle. Sous ses yeux, il découvre les villages et la ville. Il s'ouvre à un monde si proche géographiquement mais si lointain psychologiquement, un   monde parfois violent, celui  des adultes, dans une société en mutation qui passe de la domination coloniale à la souveraineté nationale. Quand, au terme de sa mission, il retourne parmi les siens avec son macabre fardeau, ce voyage l'a transformé. Il ne peut plus jeter le même regard qu'avant sur le monde adulte. Pourquoi récupérer les os de son frère, les inhumer dans ce village que ce même frère haïssait de son vivant ? Qu'est-ce que cette quête, sinon une façon pour ceux qui ont survécu de se rassurer, d'en finir avec leurs propres fantômes ? Et pour cette communauté repliée sur des coutumes et des préjugés d'un autre âge, d'oublier qu'elle est sans doute plus morte que les morts qu'elle ensevelit.

L’auteur, dans son roman ,  donne une masse d’évènements  caractérisant la société de son époque ;  plus précisément le conflit de génération ainsi que sa position vis-à-vis de ce conflit. On a , entre autres, la relation entre les personnages de différentes générations, une  relation non-dite et qui peut etre qualifiée de « conflictuelle ». De plus, il cite des caractéristiques humaines, des phénomènes sociaux tels que l’hypocrisie, la corruption…etc. Concernant, l’analyse de l’espace, une comparaison est faite par le personnage narrateur entre deux espaces opposées : l’espace citadin qui traduit le dynamisme et la vivacité des jeunes, et l’espace rural qui symbolise la passivité et la vieillesse. Il constate que l’atmosphère funèbre de son village (« aux mœurs rectilignes où les gens n’osent même pas éternuer de façon inédite » ) réside dans la somnolence des vieillards enfermés dans la « djemâa »

L’Auteur : Journaliste, poète, écrivain, né le 11 janvier 1953 à Ighil Ibahriyen (Oulkhou) , près de Azzefoune. Licence de maths’ et études en sciences de l’inforamtion. Auteur de plusieurs ouvrages.  Grièvement blessé dans un attentat le 26 mai 1993 à la sortie de son domicile (Baïnem) , il meurt le 2 juin 1993 à Alger. Il est l'un des premiers intellectuels victime de la « décennie noire » en Algérie et des attentats islamo-terroristes..

 

Extraits : « Le peuple tenait à ses morts comme à une preuve irréfutable à exhiber un jour devant le parjure du temps et des

hommes » (p 10) , « La mort, jadis, c’étaient les vieillards gagnés par la décomposition, les membres gangrénés qui suppurent, c’étaient les malades cuvant quelque épidémie et dont les êtres les plus chers finissaient par être lassés ou dégoûtés.Mais, un jour la mort avait pris le visage de la vigueur et de la grâce juvénile, le visage d’une jeunesse éternelle foudroyée soudain en plein envol » (pp 30-31), « L’avenir, mon enfant, est une immense papeterie où chaque calepin et chaque dossier (note : à propos des attestations communales de moudjahid ) vaudront cent fois leur pesant d’or.Malheur à qui ne figurera pas sur le bon registre ! » p 43), « Nous sommes un peuple où la vie active débute très tôt :berger à quatre ou cinq ans, laboureur à treize, père de famille à dix-sept ou dix-huit.A l‘âge de trente -cinq ans on cesse d’aller la tête découverte et de porter des pantalons « européens ».On arbore un chèche et les vêtements amples du pays »  (p 86), « La guerre qui vient de prendre fin constitue le noyau de la discussion, mais les consommateurs parlent aussi du temps présent, de la manière d’avoir des biens et des postes dans l’administration » (p 139), « L’acharnement de la famille est plus malfaisant que toutes les légions de l’enfer. La famille vous harcèle de votre vivant, multiplie les entraves et les baillons et, une fois qu’elle vous a poussé vers la tombe, elle s’arroge des droits draconiens sur votre squelette » (p 168)

 

Avis : Une œuvre  réaliste, qui  reflète la société dans laquelle elle a été produite. À re—découvrir pour mieux comprendre les bouleversements sociétaux et culturels durant l’après-indépendance. Grâce à une écriture , claire, directe, belle, mêlant prose et poésie.....introuvée ailleurs par la suite .Une  écriture qui révèle une grande   richesse sémantique et qui s’inscrit parfaitement dans le contexte.

 

Citations : « Le sujet préféré et inépuisable des habitants de ce pays , c’est la bouffe » (p 57), « Il ne faut pas que l’écoulement de la sève nous fasse oublier la promesse du fruit. Le sang est parfois nécessaire pour irriguer la chair du fruit et la pourvoir de ce rouge qui en faut une chair accomplie » (pp 123-124)