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Récit Kaouther Adimi- "La joie ennemie"

Date de création: 13-09-2025 18:58
Dernière mise à jour: 13-09-2025 18:58
Lu: 7 fois


CULTURE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- RÉCIT KAOUTHER ADIMI- « LA JOIE ENNEMIE »

 

La joie ennemie. Récit de Kaouther Adimi. Editions Barzakh, Alger, 2025 , 239 pages, 1200 dinars. Photo de couverture :Ahmed Adimi (le papa), Annaba 1992

 On dit qu’il ne faut jamais juger un livre à sa couverture. La couverture , c’est comme les titres en Une d’un journal.Ça doit attirer, susciter de la curiosité , accrocher. Eh bien, la couverture de l’ouvrage présenté répond parfaitement à la définition. Elle est simple, instantanée, chargée d’émotion et d’amour.......la naïveté artistique naturelle d’un papa pour sa toute jeune progéniture. Naïveté et spontanéité chargées  de couleurs......correspondant très parfaitement à l’œuvre de Baya......visitée en solitaire et de nuit par l’auteure à l’Institut du Monde arabe (Paris), un « endroit lugubre »  et  il y fait froid. Quatre ans plus tôt, elle avait accepté d’être enfermée au musée Picasso et sa nuit avait été « cauchemardesque »  et le texte  « s’était dérobé ». Une expérience déjà expérimentée par un autre auteur algéro-français, mais transcrite différemment. Si celui-ci s’était laissé aller à nous rapporter ses connaissances en matière d’art, celle-là aborde son sujet autrement. Non pas en disséquant les qualités artistiques de Baya (la peinture et la poésie, à mon avis, sont les genres les plus difficiles à juger.....même par les spécialistes) mais en mettant en valeur son parcours....parcours d’une encore enfant livrée à la curiosité (en partie malsaine) d’une société franco-parisienne à la recherche de dépaysement. On était alors en pleine gloire coloniale.

Mais , aussi, et c’est ce qui fait la force du récit, c’est la « confession » de l’auteure elle-même qui nous raconte son enfance et sa jeunesse, en France puis en Algérie.....durant les années de terrorisme islamiste. « Je voulais écrire sur elle, et pourtant, je n’écrivais que sur moi » , avoue -t-elle. Résultat final : un texte puissant où l’art est un contrepoint lumineux à l’obscurantisme.

 

L’Auteure : Née en 1986 à Alger. Etudes de littérature .Vit et travaille à Paris. Déjà auteur de plusieurs ouvrages dont le remarquable « Nos richesses » (Prix Renaudot des Lycéens, Prix du Style  et Prix Beur Fm,  en 2017) ,  « Les Petits de Décembre (2019), « Au vent mauvais » (2022 . Prix Montluc Résistance et Liberté 2023) , «  Des ballerines de papicha » (2010)......Tous parus, aussi, en Algérie.Kaouther Adimi est aussi nouvelliste avec « Le Chuchotement des anges » et « Le Sixième œuf ». A son actif aussi deux pièces théâtrales intitulées : « Le dernier quart d’heure » (2009) et Le quai des fleurs (2022)......Voir fiche documentaire in www.almanach-dz.com/culture/édition

Extraits : « Nous grandissons dans la crainte des bulletins médiocres et la croyance que, en plus de Dieu, toute l’Algérie nous observe et nous juge » (p 24), « Le portrait du radicalisé est impossible à établir, ou peut-être que si, il y a tout de même quelque chose : la fureur, la grande fureur, celle qui vous avale et vous transforme en monstre » (p 36), « L’Exposition coloniale ne se cantonne pas à Paris, un peu partout en France des manifestations sont organisées.Ainsi, à Clermont-Ferrand, une affiche annonce simplement : « Les

,noirs sont arrivés » ( p 51), « Le temps de la réparation (note : voiture en panne), nous nous restaurons dans une auberge ; au menu, des brochettes d’agneau, des frites et une glace à moitié gelée, moitié fondue.Et cela ressemble bien à l’Algérie des années 90, moitié debout, moitié foutue » (p 115), « L’arabe , martèle à nouveau mon père, n’est pas une langue étrangère, c’est votre langue maternelle ». Pourtant, la seule langue de mes pensées, de mes rêves , des histoires que j’invente est le français. Il ne disparaît pas , mais il devient clandestin.Plus mon père insiste et plus mon imaginaire , lui, résiste.C’est un territoire dans lequel il ne peut pas pénétrer » (p 149), « Je ne désirais qu’une chose pour ma part : partir, vite,

loin, sans me retourner.Courir le monde, me perdre dans le mouvement, vivre dans l’ivresse de la vie, laisser derrière moi les souvenirs des bombes et des tirs, au moins pour un temps » (p210)

 Avis :Une forme assez originale de récit alternant , avec art, le présent et le passé, le sujet central chargé de beauté et des souvenirs d’enfance et de jeunesse souvent  tragiques.

Citations : « Écrire exige de vagabonder......Écrire, c’est performer.Les écrivains marchent quand ils écrivent, écrivent quand ils marchent » (p 113), « Dans l’Algérie paranoïaque des années 90, le soupçon devient certitude »  (p 127), « Pouvoir » signifie avoir la possibilité de faire quelque chose. « Devoir », c’est être tenu à quelque chose » (p 177), « L’écrivain est toujours misérable lorsqu’il force les confidences de ses proches, lorsqu’ il insiste et espère une vérité qu’on ne veut

 peut-être pas lui donner » (p194), « Il n’y a pas d’archive sans destruction, on choisit, on ne peut pas tout garder.Là où on garderait tout, il n’y aurait pas d’archives.L’archive commence par la sélection, et cette sélection est une violence .Il n’y a pas d’archive sans violence » ( p 207, Jacques Derrida cité, in « Trace et archive »)

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