POPULATION- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ESSAI DORIA CHERIFATI MERABTINE-
« BLESSURES D’ENFANCES »
Blessures d’enfance.Réflexion sur un système de
protection. Essai de Doria Cherifati-Merabtine.
Espace Libre Editions, Alger 2024, 185 pages, 1 200 dinars.
On a déjà beaucoup écrit sur la violence en Algérie. Mais, cet écrit
produit par une professionnelle de la protection de l’enfance vise d’abord et
avant tout à proposer quelques pistes à explorer, pour rendre la protection de
l’enfant plus effective et plus globale.
Y a-t-il une spécificité de l’enfant algérien ?
En Algérie, l’enfant a une histoire qui l’ancre dans une autre, celle-ci
nationale. Son vécu durant la période coloniale n’a pas toujours été facile (et
la décennie rouge a aggravé les situations fragiles, avec l’exploitation
immorale et la mort en plus), une grande partie a eu faim, a connu la misère,
l’analphabétisme ou la déscolarisation… D’où, au lendemain de l’indépendance
(350 000 enfants orphelins de guerre) ,les
mesures prises en sa faveur dans le domaine de la scolarisation et de la santé
seront perçues comme l’expression d’une justice sociale. Des millions d’enfants
ont eu accès à l’instruction avec des résultats spectaculaires. En matière de
santé aussi … Dès l’indépendance, la protection de l’enfance a constitué un
centre de préoccupation majeure.
L’Algérie a pris d’importantes mesures pour protéger l’enfance. Des instruments
ont été créés au niveau institutionnel, en particulier l’Organe national de
protection et promotion de l’enfance. Toutefois, la complexification de la
protection de l’enfance exige de parfaire ces instruments. L’auteure pense que
nous sommes dans une phase de « construction d’un système de protection ».
Selon elle, nous sommes devant un pré-système de protection. Les institutions
fonctionnent encore en îlots. Elles sont fermées sur elles-mêmes au moment où
il faut mettre en commun l’ensemble des informations que chaque institution
détient sur les situations de violences faites aux enfants. C’est pour cela
qu’il est important de partager ce capital commun, de s’entendre sur les
finalités que l’on assigne à la protection.
L’Auteure : Docteur en sciences
sociales, enseignante-chercheure (Université
d’Alger), chargée du programme spécialisé de la protection de l’enfance à
l’Unicef, durant douze années, jusqu’en 2014.
Couverture : Hamid Boutouchent
Table des matières : Préface (Pr Houria Chafai- Salhi)/Enfance menacée/ Avant-propos/Partie I :Violence et
société (3 chapitres)/ Partie II : Violence et institutions (3
chapitres)/Partie III : Traquer la violence :Des mesures concrètes (1
chapitre)/Epilogue/ Postface (Pr Fadhila Boumendjel-Chitour)/Remerciements/
Acronymes/ Sources bibliographiques
Extraits : « De 1992 à 1998,
1183 établissements scolaires dont 706 écoles primaires, 297 collèges et 103
lycées, 18 technicums et 1 institut technologique
(Ite), etc...ont été détruits.En
1994, 915 classes du primaire et centres de formation professionnelle ont connu
le même sort. L’année 1994 fut « l’année de la terreur » (p 37),
« L’école apparaît comme un lieu propice à la violence, du moins elle
permet de la visualiser. Elle se manifeste aussi bien dans son enceinte que
dans son environnement immédiat » (p 93),
Avis : Un plaidoyer pour une
plus grande protection des enfants contre la violence. Un outil pédagogique
original qui peut, peut-être, servir aux professionnels de l’enfance. Aussi, il
pourrait servir de guide didactique entre les mains des parents soucieux de
renforcer leur rôle d’éducateurs et des personnes sensibles aux souffrances des
enfants.
Citations : « Il ne s’agit
pas de prononcer le mot droit pour qu’il le soit réellement » (p 30),
« La violence extrême peut se transmettre, même de façon inconsciente,
d’une génération à l’autre et elle peut sauter des étapes.Si
l’on n’y prend garde, elle peut réapparaître dans une période particulièrement
conflictuelle » (p39), « La sanction n’est pas uniquement une simple
punition, elle fait également partie du processus de « guérison » de
la victime » (p 46), « Le droit à la protection passe par le
lien qui se construit avec d’autres droits, méconnus du grand public et parfois
même des professionnels de l’information » (p 74), « Un droit le
devient quand il s’ancre dans la société et qu’il n’est plus uniquement
l’affaire des institutions étatiques » (p77), « La violence
est loin d’être un phénomène banal, anodin.Elle est
le fruit de nombreux dysfonctionnements , de la perversion des valeurs quand ce
n’est pas leur absence » (p103), « L’enfant, comme l’adolescent, est
porteur de vie.Aux adultes de le préserver.Son
statut dépend pour beaucoup de nous, adultes »( p163)