COMMUNICATION- FORMATION CONTINUE- LECTURE DES MEDIAS
ALGERIENS/TROIS QUOTIDIENS (II/II)
© Pr Ahmed Cheniki, fb, fin
février 2025....
2 : Trois quotidiens :Le Quotidien d’Oran,
L’Expression et Echourouk
Lire les journaux algériens est devenu vraiment stressant. Je savais que
les choses ne seraient pas faciles. Se taper treize quotidiens en quatre jours,
ce n’est pas simple, mais c’est aussi une entreprise nécessaire pour saisir un
état des lieux, plus ou moins juste, de la presse algérienne. En lisant les six
journaux, les éditions du 19 (compte-rendu critique paru le 19 février) et du
20 février, je sors avec l’idée que j’ai l’impression de lire le même journal,
de retrouver les mêmes erreurs, avec de nombreuses failles et un sérieux manque
de professionnalisme.
Dans tous les cas, les papiers les mieux écrits et qui respectent les
normes de l’écriture journalistique sont ceux puisés dans le fil des agences de
presse, APS, AFP et Reuters. Aucun quotidien, consulté jusqu’à présent, ne
dispose d’une véritable rubrique internationale, ni même une « culturelle »
stable et autonome. Le commentaire prend largement le dessus sur l’information.
Le Soir d’Algérie, par exemple, semble compter sur certains de ses chroniqueurs,
mais la chronique reste, malgré tout, un moment d’actualité commenté autrement.
Ce qui est paradoxal, ces journaux qui se présentent comme des quotidiens
d’information n’ont pas réellement cette qualité ni ne sont réellement des
lieux d’opinions, dans la mesure où la ligne éditoriale est instable, flasque
et glissante.
J’ai essayé aujourd’hui d’interroger trois autres quotidiens, Le Quotidien
d’Oran, L’Expression et Echourouk. Les trois journaux
bénéficient de la publicité ANEP : Deux pages pour le Q.O, Quatre pages pour
l’Expression et trois pour Echourouk. Les « une » ne sont pas du tout attirantes, ni informatives.
Le Quotidien d’Oran, faute de papiers d’actualité, propose dans la première
page, trois titres de commentaires ou d’analyses tirés de « L’Actualité
Autrement Vue », excluant ainsi l’information, l’instantanéité et l’actualité,
les éléments essentiels du journalisme. Echourouk et
L’Expression se battent pour placer le plus de titres possibles à la « une » :
quinze (15) pour Echourouk qui utilise les deux «
oreilles » (elles sont situées à droite et à gauche de la manchette) et neuf
(9) pour L’Expression.
Je me suis rendu compte qu’ils obéissent au même fonctionnement et à la
même organisation formelle et thématique. « L’actualité » exclut souvent la
société, favorisant l’Exécutif (Présidence, Gouvernement et Walis), parfois
l’APN ou le Sénat.
Dans les trois titres, il y a cette propension à partir de dépêches
d’agences ou de communiqués. La hiérarchisation des articles pose sérieusement
problème, comme l’organisation de la rubrique. Il y a une sorte de rupture avec
la société. D’ailleurs, l’absence de l’investigation permet de comprendre que,
pour des raisons financières ou éditoriales, les journaux se soucient peu de la
pluralité des sources et de la vérification des événements et des faits ne
prenant généralement pas de distance.
Même l’actualité dite régionale est réduite, dans de nombreux endroits, aux
faits divers. Les articles pourraient être retravaillés, approfondis et rewrités.
Les articles non signés, probablement de l’APS, sont bien écrits. Dans les
trois journaux, il n’y a pas véritablement de rubrique internationale, se
satisfaisant, très souvent, des dépêches des agences étrangères ( Agence France Presse, AFP et la Britannique Reuters). Même
en « Sports », on recourt essentiellement aux agences étrangères, la page sportive
d’Echourouk a consacré, dans l’édition du 20 février,
plus des 2/3, de son espace « sportif » à des textes d’agences.
Le Quotidien d’Oran ( l’édition d’aujourd’hui n’a
que 16 pages) consacre trois pages aux informations nationales, principalement
APS. Il y a deux « infos » apparentées faits divers. Aucune enquête ou
reportage. Le journal conserve son ancienne organisation, avec « L’analyse » et
« Raina Raikoum » qui a carrément changé de style.
La rubrique « L’Actualité Autrement Vue » est désormais d’une grande
lourdeur : articles trop longs, style en porte-à-faux avec les normes de
l’écriture journalistique, notes de bas de page, longs paragraphes dans
certains textes, trop de marques de subjectivité (adjectifs, adverbes
d’intensité ou d’opinion, impératifs… La plupart des textes devraient être
allégés et rewrités dans une perspective journalistique.
Ce qui sauve la rubrique dans l’édition de ce jeudi, c’est la chronique
littéraire de Belkacem Ahcene-Djaballah, le style est
simple, usage de phrases et de paragraphes courts, des infos sur les ouvrages
lus, biographie des auteurs et proposition de citations. Dans le numéro de ce
jeudi, le titre d’ensemble est clair : La vie, l’amour, la mort, l’auteur a
rendu compte de deux romans, Kamila, la voie de la
renaissance de Fella Andaloussia et La morsure du
coquelicot, une reprise d’une fiche de lecture en 2018. Je ne vois pas la
nécessité de la reprise d’un texte déjà publié.
Il faut savoir que cette rubrique « L’Actualité Autrement Vue », créée,
grâce à Fodil Baba Hamed, qui était la cheville
ouvrière du Q.O, avait permis au journal de gagner des dizaines de milliers de
lecteurs, devenant le quotidien le plus vendu, à l’époque. Benabbou,
le directeur et Baba Hamed, avaient décidé de recruter pour cet espace les
journalistes qu’ils estimaient être les meilleurs sur la place : Abdou B, Said Djaafer, Abed Charef, El
Kadi Ihsane, Mohamed Bensalah.
Comme en foot-ball, ils étaient bien rémunérés.
C’étaient des journalistes qui connaissaient le métier et savaient jouer de la
langue qu’ils maîtrisaient à merveille, créant une sorte de lien avec le
lecteur qui les attendait chaque jeudi.
Les rubriques culturelles sont extrêmement pauvres. Au Quotidien d’Oran,
elle n’existe pas. L’Expression donne la parole à une écrivaine, Lydia Nezar, auteure d’un roman, Matriochkas, les héritières
(entretien réalisé par Aomar Mohellebi.
A Echourouk, la rédaction préfère reprendre l’APS
(2/3 de l’espace de la page) et programme une chronique et un court papier
signé. Il n’y a pas de sportive au Q.O, les autres quotidiens préfèrent
recourir aux textes des agences, L’Expression consacre, certes, un cahier de
trois pages à l’actualité sportive, mais dominée par des textes, très
probablement, de l’APS.
La dernière page ou page-vitrine qui est une fausse « une » est très
pauvre, même si Echourouk propose une caricature de
Baki, alors que l’Expression programme une chronique de l’écrivain, Amin Zaoui.