EDUCATION-
ETUDES ET ANALYSES- RAPPORT COUR DES COMPTES 2024/ECOLE
Le
rapport annuel de la Cour des comptes de 2024 s’est intéressé cette fois non
pas aux très importants montants financiers qu’engage annuellement l’Etat pour
la réalisation des infrastructures du secteur de l’éducation, mais à l’évaluation
de la qualité de l’école algérienne. Inédit, non ! En tout cas, les évaluations
effectuées, note le rapport, ont permis d’identifier «les
dysfonctionnements et les difficultés qui entachent les pratiques pédagogiques,
les programmes d’enseignement et les acquis d’apprentissage».
Il faut
dire, en effet, que cet organe de contrôle de l’usage qui est fait des deniers
publics est appelé surtout dorénavant à se mettre au diapason de la réforme du
système budgétaire qui est entrée en vigueur en 2022. Donc pour mieux parler de
la scolarité, le temps scolaire, les performances scolaires des élèves, les
langues, les mathématiques pour ne citer que ceux-là sont autant de thèmes sur
lesquels ce rapport s’est attardé pour jeter la lumière sur un secteur que tout
le monde semble connaître un peu. «L’Etat a
accordé une grande importance à la réforme des programmes et des cours pour
tous les niveaux d’enseignement avec l’introduction de nouveaux programmes
éducatifs à partir de 2003.
Etant
donné que le système éducatif est doté d’un système de veille, le processus de
réforme a fait l’objet d’une évaluation cyclique au cours des années 2014 et
2015, à travers deux conférences nationales consacrées à cet effet, et ce,
après l’achèvement du cycle d’enseignement secondaire par les premières
promotions d’élèves ayant vécu l’expérience de la réforme.»
Les résultats des deux conférences ont conclu que «le
système scolaire peine à s’adapter aux normes internationales en termes de
management pédagogique et administratif en raison de plusieurs obstacles et
dysfonctionnements».
Il est affirmé, par ailleurs, que «les solutions à tous les dysfonctionnements relevés
imposent à l’école algérienne trois défis à relever pour devenir une école de
qualité : le défi de la refonte pédagogique, de la bonne gouvernance et celui
de la professionnalisation des personnels par la formation», selon le rapport.
Ce
dernier affirme que les principales recommandations émises à cet effet ont été
prises en charge par le gouvernement à travers, notamment, le plan stratégique
sectoriel 2021/2024. Citant le document portant «L’école
algérienne et les enjeux de qualité – Cadre stratégique 2015-2030», celui-ci
souligne que le rendement du système scolaire algérien est considéré comme
«l’un des systèmes les plus bas au monde». «Le
chiffre ‘‘théorique’’ de 32 semaines par an au minimum, a-t-on noté,
n’est toujours pas atteint sans compter les fréquentes interruptions de
travail.
A titre
de comparaison, la durée annuelle moyenne de l’enseignement primaire mondiale
et européenne est respectivement de 36 et 38 semaines». «De même, la comparaison du volume horaire hebdomadaire des
mathématiques dans l’enseignement primaire révèle des déséquilibres évidents :
Algérie 720 heures, Tunisie 960 heures et France 900 heures.»
Selon la
Cour des comptes, «cette insuffisance en matière
d’organisation du temps scolaire, rajoutée à la prééminence de l’activité de
contrôle des contenus au détriment du concept d’évaluation des compétences, a
entraîné un enseignement massé et la non-acquisition des fondamentaux
disciplinaires».
Reprenant
les travaux d’évaluation menés par les services
du ministère de l’Education nationale sur des acquis des élèves sur une longue
durée (2012-2016), il ressort qu’«en majorité, les élèves sont capables
de lire, de comprendre, de repérer des indices, de classer des événements dans
un contexte narratif et de mettre en œuvre des règles dans 25 des situations
simples, mais, néanmoins rencontrent des difficultés dans la recherche
d’informations implicites dans un texte». «La
production de textes en langues, aussi bien en arabe qu’en français, pose,
a-t-on ajouté, d’énormes obstacles aux élèves.»
Les
Mathématiques ?
«Les opérations d’identification et de
mobilisation des ressources nécessaires et leur intégration pour la résolution
de problèmes ne sont pas acquises. Ces difficultés sont liées à la faiblesse du
dispositif didactique mis en place dans le processus d’apprentissage et qui ne
permet ni aux enseignants, ni aux élèves de rompre avec les pratiques
traditionnelles, empreintes de mémorisation/restitution des connaissances.»
Au sujet
de l’éducation scientifique et technologique, elle se limite à «finaliser un savoir en classe, alors qu’il s’agit de
développer chez l’élève des attitudes scientifiques : aptitude à penser,
abstraire, synthétiser, analyser, généraliser, extrapoler, mesurer, illustrer,
problématiser, critiquer, etc.»
Ce texte
de la Cour des comptes, évoque également la
performance des élèves aux examens officiels, notamment celui de la fin du
cycle obligatoire (BEM). «Ce sont, de manière
générale, les disciplines, dites littéraires, qui obtiennent les moyennes les
plus élevées. Les disciplines scientifiques et les langues étrangères se
présentent au bas du tableau.
Ceci a eu
pour conséquence la quasi-désaffection de l’option d’orientation scientifique
et surtout technologique chez les parents et les élèves. A titre
d’illustration, en 2016, la structure de l’enseignement secondaire montre
l’infirme importance donnée à la filière ‘‘mathématiques’’ (03,46%), et
techniques mathématiques (11,13%). L’enseignement technologique, avec 15,80%,
est en deçà des standards internationaux (30%).»
Les
évaluations dont il s’agit montrent également l’importance du préscolaire dans
le succès ultérieur des élèves. Et pour cela, les statistiques du ministère de
l’Education nationale, selon la même source, font
ressortir «un taux national d’implantation d’environ 50% du préscolaire
au cours de l’année scolaire 2015/2016 et projettent, à 2018, sa totale
généralisation. Néanmoins, cet objectif n’a pas été atteint ce qui a conduit à
repousser cette échéance à l’horizon 2024».
La
dernière statistique relative à l’année scolaire 2020/2021, a-t-on ajouté, montre un taux de couverture nationale de près
de 59% dans les structures du secteur et 79% en impliquant les autres
partenaires. «Par conséquent, les élèves entrant
en première année primaire n’accèdent pas à l’école avec les mêmes chances de
réussite avec le risque de consacrer une école à «deux vitesses».
«Le phénomène des cours particuliers, en
tant que réalité en lien avec la qualité de l’enseignement public, n’a pas fait
l’objet d’étude appropriée par le ministère de l’Education nationale. En effet,
les investigations et les entrevues effectuées auprès des services du ministère
ont fait ressortir l’absence d’études ou d’enquêtes récentes et approfondies
portant sur l’ampleur, les raisons et l’impact de ce phénomène, considéré par
tous comme une activité informelle qui tend à se généraliser.
Ce sont
plutôt les syndicats des travailleurs de l’éducation, les médias et les
enquêtes universitaires qui ont plus évoqué et analysé cet état de fait. »
C’est ce qu’a relevé ce rapport de la Cour des comptes qui reprend, par
ailleurs, les conclusions d’une étude réalisée par l’université de Tiaret sur
les causes et les effets des cours particuliers dans le système éducatif.
Selon
cette dernière, le pourcentage d’élèves ayant
suivi des cours particuliers au cours de l’année scolaire 2012/2013 en
cinquième année primaire était de 40,90% et 48,73% pour la quatrième année
moyenne, alors que ce taux était de 66,91% au cours de l’année scolaire
2013/2014, en troisième année secondaire.
Les
matières les plus sollicitées pour la cinquième année primaire sont la langue
française à raison de 74,50%, la langue arabe à raison de 64,60%, puis les
mathématiques avec une proportion de 57,20%. Ce phénomène, a-t-on considéré, est expliqué en particulier, par «le
manque de supervision et de suivi au sein des établissements scolaires,
l’insuffisance dans la compréhension et la perception des cours des matières de
base, la faiblesse des résultats scolaires et la pression sociale pour
l’obtention de meilleures notes ou niveaux scolaires».
Parmi ces effets socio-économiques,
l’étude a notamment cité « la difficulté
pour le système éducatif à maintenir la confiance des parents d’élèves dans
l’école en tant qu’établissement d’enseignement qui vise à remplir pleinement
sa mission», « l’accentuation des différences sociales et l’épuisement des
ressources financières des familles», « la dépendance de l’élève, sa
surcharge et sa privation de repos et de loisirs indispensables pour sa
croissance équilibrée». Le rapport conclut que les services du ministère de
l’Education nationale «sont appelés à réserver
l’intérêt conséquent à cette activité».
D’ici à… 2030
La Cour d