VIE POLITIQUE- FORMATION CONTINUE- L’ART ORATOIRE/MAÎTRISE
L’art oratoire est-elle une compétence mieux maîtrisée par les jeunes
générations ?
© https://isarta.com/infos/ Philippe Jean Poirier,7 novembre 2024
«La communication interpersonnelle et la communication devant public, c’est
deux choses, dit André Hamilton, formateur Isarta. En
petit groupe, il n’y a pas de jugement. Et il n’y a pas d’enjeux de
performance. Parler devant public, ça demande de la préparation. Et il faut
accepter de se montrer vulnérable.»
7 novembre 2024
À l’école, l’accent est mis depuis plusieurs années sur les habiletés de
communication écrite et orale des étudiants. Sur les médias sociaux, les jeunes
adultes ne se privent pas d’exprimer leurs opinions haut et fort. Est-ce à dire
que la nouvelle génération de travailleurs a déjà toutes les compétences
requises pour s’exprimer devant un public? Nous avons
posé la question à André Hamilton, coach de conférenciers, qui donne la
formation «Storytelling :
Augmenter l’impact de vos présentations orales».
Bonjour André. Vous avez coaché plusieurs étudiants et jeunes
professionnels dans leurs présentations orales. Quelle est votre perception de
leurs compétences en communications ?
André Hamilton : Quand je donnais le cours “communication orale” à l’Université de
Montréal, plusieurs de mes étudiants avaient de la difficulté avec leur
présentation de thèse. C’est une chose de pouvoir s’exprimer devant un petit
groupe ou dans un contexte interpersonnel, mais c’en est une autre quand il y a
un enjeu comme l’obtention d’une bourse ou d’une promotion. Plusieurs de mes
étudiants avaient de la difficulté à maîtriser leur stress et structurer leur discours.
La nouvelle génération semble pourtant déjà très à l’aise pour s’exprimer,
dans toutes sortes de contexte…
A. H. : La communication interpersonnelle et la communication devant public sont
deux choses différentes. En petit groupe, il n’y a pas de jugement. Et il n’y a
pas d’enjeu de performance. Parler devant un public demande de la préparation.
Et il faut accepter de se montrer vulnérable.
Quand je dis cela, je ne porte pas de jugement sur les compétences de la
nouvelle génération. À l’école, quand j’étais jeune, ce n’était pas mieux. On
nous demandait de faire des présentations orales sans aucune préparation… et
nous étions très mauvais !
L’avènement des médias sociaux ne donne-t-il pas une longueur d’avance à la
nouvelle génération, qui n’a visiblement pas peur de s’exprimer
« publiquement » sur ces plateformes ?
A. H. : Sur les médias sociaux, on réagit à chaud ; ce n’est pas
nécessairement de la communication, c’est davantage une décharge émotive.
Ensuite, les propos ne sont pas toujours bienveillants. Les gens expriment
leurs opinions de manière catégorique. Est-ce qu’on se met à la place de
l’autre ? Est-ce qu’on réfléchit aux émotions qu’on veut lui faire vivre ?
Je ne crois pas. Et c’est toute la force du storytelling oral.
Parmi la jeune clientèle que vous accompagnez, voyez-vous des forces ou des
compétences particulières qui démarquent, au niveau de la communication ?
A. H. : Je vois des idées extraordinaires. Et la structure, souvent, est
différente. Ça amène un vent fraîcheur. J’ai travaillé avec une
auteure à qui on avait demandé de faire une conférence. Elle a dit
« non », je ne veux pas faire une conférence, je veux faire un
témoignage.
Elle faisait du storytelling à sa manière ?
A. H. : En effet ! D’ailleurs, c’est toute la différence entre le
storytelling à l’écrit et à le storytelling à l’oral. Quand les gens se
déplacent pour nous écouter, ils veulent entendre notre histoire, notre
expérience, notre vécu. Pour raconter une histoire qu’on a vécue, il faut
accepter d’être vulnérable. On se dévoile pour se connecter à l’autre.
Les humoristes savent très bien le faire. Le storytelling, c’est un art qui
ajoute énormément à nos capacités de communication. Ça enlève les filtres que
peut avoir un auditoire. Quand on écoute un conférencier, on a tout un bagage
d’attentes et d’idées préconçues. Les histoires ont une dimension universelle; quand une personne raconte une histoire, il se
peut qu’on ait vécu quelque chose de similaire. C’est ce qui permet de se
reconnaître et se connecter les uns aux autres.