POPULATION- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN YASMINA
KHADRA- « CŒUR D’AMANDE »
Cœur- d’amande. Roman de Yasmina Khadra .Casbah
Editions, Alger 2024, 313 pages, 1500 dinars.
Deux
nains, une enseignante très âgée, une mamie aimante mais perdant peu à peu le
fil de la réalité , la vie dure, simple mais
tranquille et solidaire d’un quartier populaire et populeux de Paris.Un quartier où se mêle tous les peuples et tous les
destins. C’est là toute l’histoire de ce nouvel anti-héros ,
doux et empathique, pas épargné par la vie, touché par le chômage, créé
par l’auteur . Le héros , c’est Nestor, Ness ou Cœur
d’amande (« Kalb Ellouz »)
pour les amis (dont trois indéfectibles ses trois copains: Frédo le
grand frère de tout le monde, Kader et Confucius, toujours là pour donner sa
citation), petit bonhomme mais grand résilient . Ness a été rejeté par sa
mère et il est atteint de nanisme, Nestor vit chichement avec sa grand-mère à
Barbès, au pied du Sacré-Cœur à Paris. Il fait face avec le courage d’un
grand bonhomme. Il adore sa mamie qui l’a
élevé depuis qu’il avait été abandonné par sa mère, et il n’arrive pas à
accepter qu’elle « vieillisse » et « perdre l’esprit ». Heureusement les amis sont là. Même si tous ne
comprennent pas cette façon qu’il a de toujours voir le bon côté des choses.
Tout nain qu’il soit, prématurément abandonné par sa génitrice et, au début de
l’histoire, licencié par le patron du magasin de chaussures qui périclite et
n’a pourtant rien à lui reprocher, Nestor ne renonce certes pas. Il prend là
exemple sur Kader, le clandestin algérien, prêt à tous les labeurs afin
d’obtenir enfin le droit de vivre en France. Il se consacre surtout à sa grand-mère,
autrefois professeure, dont il refuse d’admettre qu’elle perd l’esprit. C’est
alors que sa mère surgit de son néant, afin d’obtenir l’enfermement de sa
propre mère dans un établissement spécialisé, puis la vente de leur appartement,
quitte à en chasser Nestor. Celui-ci se résout alors à un séjour à la Roque d’Anthéron, à l’invitation de Léon, nain lui aussi et qui
plus est, atteint d’une très grave maladie. Léon voue une éternelle
reconnaissance à Cœur-d’amande qui fut le seul à lui
tendre la main lors d’un moment difficile. C’est lui qui le convainc d’aller
jusqu’au bout de son rêve. En l’occurrence, l’écriture d’un roman qui trouve
promptement un éditeur ...et ses amis du quartier vont se
charger de lui assurer un succès, d’une manière très inattendue.....en
« envahissant les libraires des environs, ce qui attiré l’attention des
grands médias.....Voilà donc une nouvelle et non coûteuse manière de marketer
un produit !
L’Auteur : Né en janvier 1955 à Kenadsa, élève de l’Ecole des
cadets de la Révolution, ancien officier de l’Armée nationale populaire, Yasmina Khadra , de son vrai nom Moulessehoul Mohammed, est , aujourd’hui ,
un écrivain très connu . Lu dans des dizaines de pays , il est traduit en près de 50 langues.
Il a , à son actif plusieurs dizaines d’œuvres La plupart sont des romans dont certains ont été adaptés au cinéma et
au théâtre et même en bandes dessinées.........ceci sans parler des ouvrages (dont des
romans policiers) publiés sous pseudonyme au milieu des années 80
et au tout début
des années 90, inventant même un personnage fameux, celui du Commissaire Llob .
A noter qu’il a co-signé, aussi, des scénarii de films.....qu’il a été un certain temps directeur du
Centre culturel algérien à
Paris...et qu’il a même tenté une courte « aventure »
politique lors de présidentielles! Grand Prix Prix littéraire de la Grande Mosquée
de Paris 2024 du Jury pour l’ensemble de
son œuvre et à l’occasion de la publication de son
nouveau roman « Cœur d’amande »
Extraits : « Lorsqu’il
t’arrive de t’apitoyer sur ton sort, rappelle-toi que la souffrance est
ailleurs » (p19), « Il n’y a pas de
risque non négociable pour celui qui veut vivre pleinement sa vie. Celui-là
doit savoir gérer les échecs, relever les défis et se désaltérer dans le sueur
de son front comme dans une eau bénite.Le
monde est une combinaison de hauts et de bas et nous en faisons partie »
(pp 22-23), « Qui veut accéder au nirvana doit commencer par accéder à lui-même.Il n’est pas de plus légitime ivresse que d’être
épris de sa propre personne, et de plus heureuse transcendance que de se fiche
éperdument de ce que pensent de nous les autres. Quand bien même on risque de
perdre au change, dans une société où le paraître prime l’être
, on aura gagné l’estime de soi, et rien n’est plus gratifiant que de
s’accepter tel qu’on est » (p274)
Avis :La vie des humbles et des marginaux.Le
sort des personnes âgées et/ou en situation de handicap. Un regard tendre et
humaniste. Un livre qui se lit d’un seul trait malgré toute une certaine
tristesse qui le traverse.Un
livre pour tout le monde....la marque de fabrique de Yasmina Khadra.
Citations : « Ne voit le mal partout que celui qui a le mal en
lui » (p 165), « Le meilleur ami de l’Homme,ce n’est pas le cheval ni le fusil ni le chien
(....).Le meilleur ami de l’Homme est le livre.Il ne
demande pas grand-chose, le livre, ni que tu l’emmènes chez le vétérinaire ni
que tu lui donnes à manger. Tu l’ouvres, et il déploie le monde devant toi, te
transporte, tel un tapis volant, vers des contrées insoupçonnables, te fait
aimer des êtres de fiction qui deviennent de vraies personnes pour toi et qui
te parlent ... » (p190), « Il n’y a rien de contre-nature en amour.
Lorsque deux adultes sont consentants, ils emmerdent pape et consorts.Si les préjugés ont la
peau dure, on n’a qu’à leur pisser dessus pour les ramollir.Ce
qui est contre-nature, ce sont les essais nucléaires, la déforestation, la
pollution, la famine, les guerres.. » (p245)