RELATIONS INTERNATIONALES- USA- USA/ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES NOV. 2024/
PRESSE
(© Afp)
C’est une tradition de longue date : à
l’approche de la présidentielle américaine, les grands journaux prennent parti
pour l’un ou l’autre candidat. Cette année, certains y ont renoncé, provoquant
un vrai séisme dans la campagne.
C’est une annonce qui a fait office
d’une bombe, à quelques jours de l’élection présidentielle américaine, prévue le 5 novembre 2024. Le Washington Post, l’un des plus grands titres du pays, a
annoncé qu’il ne soutiendrait ni Kamala Harris, ni Donald
Trump.
« Nous sommes conscients que
cette décision donnera lieu à de nombreuses interprétations […] ou comme une
fuite devant nos responsabilités. C’est inévitable. Ce n’est pas notre
avis », a aussitôt expliqué le
directeur William Lewis, vendredi 25 octobre, anticipant la pluie de
critiques. Cette neutralité affichée sera aussi appliquée lors des futurs
scrutins, a-t-il ajouté, par souci d’indépendance.
Des journaux se mettent en retrait
C’est une première en trente ans
pour le journal, plutôt marqué à gauche. Depuis 2008, il soutenait d’ailleurs
les candidats démocrates. « C’est de la lâcheté, et la démocratie
en est la victime », a tonné l’ex-rédacteur en chef du journal, Marty
Baron.
D’autres anciens grands noms du
média, les journalistes Bob Woodward et Carl Bernstein (qui avaient
d’ailleurs révélé le scandale politique du Watergate) ont rappelé que le Washington Post avait lui-même publié
des preuves « accablantes » sur « la
menace que Donald Trump fait peser sur la démocratie ».
Plus tôt dans la semaine, c’est
le Los Angeles Times qui a refusé lui aussi d’apporter son
soutien à Kamala Harris, sur décision du milliardaire et propriétaire du
journal Patrick Soon-Shiong, contre l’avis du comité
éditorial.
En signe de contestation,
plusieurs employés ont remis leur démission, dont la responsable éditoriale du
journal, Mariel Garza. « Je n’accepte pas que nous restions
silencieux […] dans ces temps dangereux », a-t-elle expliqué.
Pour ces deux journaux, de
nombreux lecteurs ont également annoncé vouloir se désabonner.
Des intérêts financiers
Pour certains grands titres, il
vaut mieux ne pas se mettre Donald Trump à dos, en cas de victoire
républicaine. Certains ont des intérêts financiers liés au gouvernement. C’est
le cas de Jeff Bezos, fondateur d’Amazon et propriétaire du Washington Post :
les sociétés dont il est actionnaire ont signé ces dernières années de gros
contrats avec l’administration, dont le Pentagone.
« Les gens veulent être du
bon côté de Donald Trump », résume à l’AFP Dannagal Young, professeure en communication et en sciences
politiques à l’université du Delaware.
La tradition des soutiens médiatiques,
généralement décidée par des comités d’éditorialistes (et non par les
rédactions), est plus que centenaire. Et ces soutiens médiatiques « continuent
de compter », insiste Jane Hall, professeure en communication de
l’American University.
Le New York Times, le Boston
Globe, le magazine Rolling Stone et le Philadelphia
Inquirer ont eux
apporté leur soutien à Kamala Harris. Quant à Donald Trump, il a recueilli
l’appui du New York Post et du Washington Times.
Mais la tradition a connu ces
dernières années un déclin aux États-Unis, dans un contexte de crise économique
des médias traditionnels, qui perdent de l’importance face aux réseaux sociaux.
Ainsi, l’attention des électeurs, à l’ère du tout numérique, se porte davantage sur d’autres supports tels que
les podcasts ou TikTok.