COMMUNICATTION- FORMATION CONTINUE- COMMUNICATION
ET INTÉRÊT GENERAL
https://jai-un-pote-dans-la.com/Edwige Brelier, 25 juin 2024Dw 25 JUIN 2024, 25 JUIN 2024/ 25 juin 202425 JUIN
Dans
un univers où les frontières disparaissent peu à peu, et au gré des avancées
technologiques, la communication joue un rôle prépondérant. Les annonceurs,
tout comme les pouvoirs publics, ont désormais une responsabilité inégalée, du
fait de la diversification des canaux de communication, mais également de
l’impact de toute campagne de communication, qui est plus fort que jamais.Dès lors, comment
communiquer tout en servant l’intérêt général ? Comme nous l’a brillamment
montré le cofondateur de Patagonia, les annonceurs
peuvent œuvrer dans le sens de l’intérêt général. En effet, Yvon Chouinard,
également alpiniste, avait fait don de son entreprise pour défendre
l’environnement. Un beau geste, réalisé en 2022, qui a probablement marqué plus
d’un annonceur. Dans cette interview exclusive, nous avons rencontré Jocelyn
Di-Scala, intervenant et formateur relations publiques et relations médias au
sein de l’European Communication School,
et Nina Kurose, Directrice du Développement de The
Good Company.
JUPDLC : Tout d’abord, pourquoi est-il prépondérant d’avertir les
populations sur des questions d’intérêt général ? Avez-vous des exemples de
campagnes réussies ?
Nina Kurose :
Le rôle de la publicité a toujours été de rendre public des messages – qu’ils soient
de nature commerciale, politique, environnementale ou sociétale – pour ensuite
déclencher un changement de comportement ou d’attitude. La publicité est donc
par essence un outil à vocation publique : un levier puissant pour adresser des
questions d’intérêt général, pour stimuler un débat qui fait avancer la
société, pour éduquer ou générer une prise de conscience auprès de la population.Nous venons de sortir
une campagne pour Positive Minders, une association
qui accompagne les personnes atteintes de maladies psychiques. Appelée “Les Schizawards”, la campagne vise à
remodeler l’imaginaire collectif autour de la schizophrénie, en démontant les fausses
représentations de la maladie répandues dans le cinéma et les séries. C’est de
la mauvaise compréhension de la maladie que découlent des conséquences lourdes
sur la détection, l’accès aux soins, et l’intégration des personnes touchées
dans la société. L’objectif de la campagne est donc de lutter contre la
stigmatisation et les idées reçues autour de la schizophrénie et d’amener le
public à changer leur perception de la maladie.
Jocelyn Di-Scala : C’est
prépondérant car il y a une diffusion massive. Pour ce qui est des exemples de
campagnes réussies, je citerais sans hésitation la vieille campagne du pétrole,
ou encore les campagnes pour valoriser les élections et réveiller les votants,
et enfin toutes celles concernant la prévention routière.
JUPDLC : Dans le cadre de votre métier,
comment vous positionnez-vous sur les questions d’intérêt général ?
Qu’apportez-vous à vos élèves sur le sujet ?
Jocelyn Di-Scala : Dans mon
métier, j’ai été amené à traiter des causes d’intérêt général dans le cadre
d’une vision politique et au sein d’un cabinet politique. En tant que
formateur, et travaillant beaucoup sur les marques et la gestion de l’image des
personnalités, il n’est pas fréquent d’aborder ces sujets. En revanche,
l’intérêt général est bien entendu abordé comme un supplément, une valeur
ajoutée. Et une option dans la force de communication.
JUPDLC : Selon vous, les questions
d’intérêt général sont-elles l’apanage des pouvoirs publics ou les acteurs
privés sont-ils également concernés ? Pourquoi ?
Jocelyn Di-Scala : Je dirais que
les deux sont concernés. Il s’agit d’une vraie force en politique, donc pour
les pouvoirs publics, mais les forces privées associées y gagnent également
dans leurs différentes campagnes de communication.
Nina Kurose :
Bien sûr que les acteurs privés sont aussi concernés par les questions
d’intérêt général – ce sont des questions qui touchent leurs consommateurs,
leurs collaborateurs et la société dans laquelle ils sont acteurs. Chaque
marque a un rôle important à jouer dans la vie de ses publics, et une
obligation de répondre à leurs attentes. Aujourd’hui, les gens font plus
confiance aux marques qu’aux pouvoirs politiques. Elles ont ainsi une immense
opportunité grâce à leur relation privilégiée avec leurs publics cibles, et par
conséquent, un devoir de faire passer des messages d’intérêt général. Au-delà
de ça, c’est également un levier de fidélisation et de préférence : plus les
gens ont de preuves de la valeur ajoutée d’une marque dans leur vie
quotidienne, plus elle sera privilégiée.
JUPDLC : De plus en plus de campagnes sont tournées vers l’intérêt général,
notamment dans le domaine environnemental et la nécessité de préserver la
planète. Comment ne pas tomber dans le greenwashing ?
Nina Kurose :
Le plus important est d’avoir des actes concrets derrière le discours : une communication responsable doit
toujours partir des preuves. Elles sont des éléments clef pour permettre à la
marque de s’exprimer avec authenticité et transparence, quand les preuves
futures sont la boussole pour la guider et embarquer ses publics vers cette
vision commune. Les preuves peuvent prendre beaucoup de formes : engagements corporates, partenariats et collaborations ou même une
posture de marque maintenue sur le long terme, qui ne fluctue pas au gré des
tendances.
Jocelyn Di-Scala : Aujourd’hui,
lorsque l’on est une marque, je dirais que c’est quasi impossible. En effet,
pour un annonceur, il est difficile de parler d’écologie sans faire de
greenwashing, ou créer de conflits d’intérêts. Mais le sujet est bien
évidemment incontournable. C’est, me semble-t-il, une étape nécessaire à
dépasser pour aborder les sujets de fond.
JUPDLC : Comment accompagnez-vous les marques sur des campagnes d’intérêt
général ? S’agit-il le plus souvent d’une volonté de leur part, ou est-ce vous
qui suggérez d’aborder cette thématique ?
Nina Kurose :
Nous voyons régulièrement des marques qui font des belles choses, ont des
engagements et des valeurs fortes, mais n’osent pas en parler. C’est souvent
celles qui font le plus qui disent le moins, par peur de s’exposer à des
critiques ou à un potentiel “bad buzz”. Mais par
conséquent, cela laisse la place aux autres acteurs, moins forts en preuves et
en sincérité, qui prennent alors la parole et se positionnent avec une image responsable.Nous accompagnons donc
nos clients à identifier les bonnes preuves (actuelles et futures) qui vont résonner
avec les consommateurs et sont cohérentes avec le positionnement de la marque,
pour ensuite les exprimer de manière impactante. Dans le choix des clients,
notre but n’est pas de travailler seulement avec les marques les plus “good” du
monde, car pour réellement changer les choses, il faut aussi accompagner les
plus gros acteurs, les plus « mainstream« ,
vers des changements responsables.
JUPDLC : Quel est le bénéfice de ce
genre de campagnes pour le consomm’acteur
contemporain ?
Nina Kurose :
Le premier bénéfice est de leur permettre d’être informés sur des sujets qui
les concernent et de proposer des moyens d’agir. Cela leur permet aussi
d’identifier les marques qui partagent leurs valeurs et proposent des solutions
en phase avec leurs besoins afin de les accompagner dans le changement.