CULTURE-
BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN ABDELAZIZ OTMANI- « SÎN,
LA LUNE EN MIETTES »
Sîn, la lune en
miettes. Roman de Abdelaziz Otmani. Casbah Editions, Alger
2023, 491 pages, 1 800 dinars
Un univers
captivant. Puisé des premiers récits mésopotamiens tels que l'Épopée de
Gilgamesh et les récits de l'Antiquité nord-africaine. Avec un tourbillon de prénoms ,donnés aux acteurs, qui ne sont pas familiers
à la sphère algérienne, ni connus dans l'espace maghrébin.
Après Ziusudra,
dernier roi d'avant le déluge, de nombreuses générations vivent et
prospèrent après lui, jusqu'à ce que Bahâa, porteuse
du futur dirigeant, mette au monde des jumeaux. Or, il est de coutume que les
doubles soient offerts en holocauste au feu, sous le regard fervent de la
foule. Et , c’est à ce moment qu'intervient Elibaâl, prêtre d'un temple de la cité d'Ur-sag, et lui-même descendant de Ziusudra,
pour sauver un des deux enfants des flammes. Il le confie à une tribu
lointaine.
Loin de sa terre
natale et des intrigues entre divinités mineures, Hevél , l’Amnukal, qui sera le premier prophète après le déluge,
celui qui va enseigner d’aimer son prochain, va aller quêter
son origine et le secret qui l'unit à un étrange animal , un « shadhawar »-ni gazelle, ni licorne et carnassière de
plus - nommé Sîn qui l'accompagne depuis sa
naissance. Un ange gardien sur pattes.En
fait, le divin Sin avait erré sur terre, jusqu’au jour où il pénétra de
son âme l’enveloppe de l’enfant alors voué aux flammes destructrices .Il
l’empêcha d’être consommé par le feu et lui transmet sa sagesse. Sin est un
dieu de la lune , de la lumière et de la connaissance,
grand dans sa compassion et sa miséricorde....
Hevél et ses fidèles compagnons vont cheminer dans une nation en
plein bouleversement, alors qu'un culte nouveau clame avec fracas la fin du
monde connu.
L’Auteur :Né à Boufarik en 1990. Cursus universitaire littéraire en France. Enseignant
(en Algérie) de littérature francophone. Passionné d’archéologie et
d’anthropologie. Séjour au Vénézuéla. Retour en
Algérie en 2018. Gère un espace d’enseignement artistique, animant des ateliers
d’écriture....puis repart en France.
Extraits : Il (note :
Hével, le personnage central) comprit à cet instant
que Sîn n’était pas eulement
son compagnon et ceci lui sembla comme une évidence, non pas une révélation,
mais comme une réalité enfouie au fond de lui depuis toujours.Il plongea ses yeux dans ceux de l’animal et
vit pour la première fois sa propre âme s ’animer à l’intérieur »
(p79), « Il était inimaginable pour une femme, d’aller à Kilugal la nuque nue, qu’on la prendrait pour une prostituée.
Samuramat refusait catégoriquement de lâcher ses
cheveux, arguant que les hommes n’avaient qu’à être moins vicieux dans ce
pays » (p 133) , « Tout ce que
vous savez faire, vous, du temple, c’est de porter des robes et dessiner des
traits dans l’argile. Dès qu’il s’agit de tenir une arme, il n’y a plus personne.Ce n’est pas comme ça
qu’on défend un pays, mon petit, il faut de la force et de la volonté »
(p150), « Les hommes ont besoin d’un guide qui se sente concerné par
leur malheur et leur souffrance, pas d’un chef de guerre.Bien
des hommes savent manier le glaive et la lance, Kilugal
en compte plein, mais peu d’entre eux s’épuiseraient à rendre leur
peuple heureux » (p 357)
Avis : Ouvrage très bien
structuré. Avec une histoire qui remonte à loin, à très loin (trop loin ?) . Un long (trop long ?) voyage......à s’y perdre.
Citations : « Un moyen de
combattre efficacement l’usurpateur sans lui mener la guerre (.....).C’est
simple, le moyen le plus efficace serait de réduire les injustices (...).Il
procède au recrutement parmi les esclaves, les mercenaires et les ignorants en
leur promettant liberté, justice et fortune. Il se sert de ce discours pour
diviser et semer le chaos » (p 200), « La guerre, voilà ce qui provient de l’humain, la guerre, la misère et la désolation.l’Homme aime cela.Cela
lui permet d’étaler sa force et d’accéder facilement au pouvoir et à la
gloire. Il n’y a que le mal qui anime le cœur des hommes, le mal qu’ils
cherchent à raisonner, à justifier, à vêtir d’une noble cause.Mais la guerre, le meurtre et la désolation ne
détiennent aucune noblesse en elles » (p 461)