VIE POLITIQUE-
PERSONNALITÉS- SAÏDA NEGHZA
©Salima Tlemçani/El Watan, 11 juin 2024
Contrairement aux
trois candidates à la candidature au scrutin présidentiel, Zoubida Assoul,
présidente de l’UCP (Union pour le changement et le progrès),
Louisa Hanoune, secrétaire générale du PT
(Parti des travailleurs), et Fatma Zohra Zerouati,
présidente du parti Taj (Tadjamou Amel El Djazair), la femme d’affaires Saïda Neghza n’est adossée, officiellement, à aucun parti
politique.
Elle se présente en tant que femme
entrepreneur, à la tête de la CGOA (Confédération générale des entreprises
algériennes) et du groupe Soralcof Algérie, et risque
donc de ne pas pouvoir réussir la plus importante étape du scrutin, à savoir la
collecte de 50 000 signatures de citoyens, ou celles de 600 élus à travers
29 wilayas du pays. Un exercice qui a mis out de nombreux candidats à la
candidature, durant les précédents scrutins.
Connue comme étant une femme battante,
entrée dans le monde de l’économie privée au début des années 1990, à travers
la torréfaction du café, un produit de large consommation en rupture dans le
marché, à cette époque, Neghza s’est lancée, dès le
début des années 2000 dans le BTPH, alors en plein essor avec l’arrivée du
défunt président déchu, Abdelaziz Bouteflika et les grands projets de
logements. Sa société Errep décroche un plan de
charge juteux, qui lui a permis de se faire connaître dans le secteur et de
voir plus grand, en créant le groupe Soralcof (de
travaux publics et hydrauliques).
Confrontée à d’énormes problèmes avec
ses travailleurs et ses vis-à-vis et de lourdes pressions qui ont terrassé sa
santé, la femme d’affaires a dû vendre tous ses biens personnels pour payer son
personnel et pour faire redémarrer ses chantiers, elle a dû intervenir auprès
de l’ancien Premier ministre, Ahmed Ouyahia.
Ses affaires vont reprendre, avec
l’acquisition de trois sablières et une marbrière, qui ont fait remonter la
valeur de son capital. Elle intègre la CGEA, grâce à Mahfoud Megatli, alors secrétaire général, avant de présider le bureau
d’Alger et d’être hissée à la tête de l’organisation en tant que
vice-présidente.
Quelque temps plus tard, elle va
représenter la CGEA, au sein d’une association patronale (dont l’organisation
est membre fondatrice), BusinessMed, à laquelle sont
associés 19 pays des deux rives de la Méditerranée, qui vont l’élire en tant
que vice- présidente, en 2014, puis comme présidente de sa section femme
entrepreneure.
Guerre
médiatique entre le FCE et la femme d’affaires
Le tremplin va lui
permettre de se faire connaître en dehors de cette Algérie, marquée par la
montée de l’oligarchie affairiste qui gravitait autour du président déchu,
Abdelaziz Bouteflika. En 2015, Neghza occupe la Une
de la presse nationale, en dénonçant publiquement Ali Haddad, alors patron du
FCE (Forum des chefs d’entreprise), un syndicat patronal, mis au service du
frère du défunt président. Pour une seconde fois, elle dénonce les «menaces» dont elle fait l’objet et exhorte la justice à
s’autosaisir.
Lors d’une conférence de presse animée conjointement
avec le défunt président de la CGEA, Habib Yousfi, en présence des
représentants d’une quarantaine de bureaux de l’organisation, elle dénonce
encore une fois Ali Haddad et quelques-uns de ses proches collaborateurs qui,
selon elle, l’ont «menacée de mort, elle et ses
enfants», ajoutant : «C’est un membre du FCE qui a pris part à cette
réunion qui m’en a informé».
Pour cette femme entrepreneure qui
venait d’être classée 12e femme la plus influente, sur les 110 issues de la
région MENA, «Haddad veut s’imposer comme
interlocuteur unique des pouvoirs publics et comme représentant unique du
patronat, y compris à l’étranger». En février 2016, elle succède à Yousfi à la
tête de l’organisation, et trois ans après, elle prend la direction de BusinessAfrica. Les graves problèmes de santé l’éloignent
des affaires durant un bout de temps avant de refaire parler d’elle.
C’était l’automne 2022, lorsqu’elle a
été sacrée, à Genève sous le patronage de l’ONU, présidente
du club des meilleures femmes d’affaires d’Afrique, puis, en février 2023. Un
succès suivi d’un autre, une année plus tard, en étant classée par Forbes
Afrique parmi les cinquante femmes les plus influentes du continent.
Forte de ces distinctions, elle saisie le président Tebboune, par
une lettre, mise en ligne sur les réseaux sociaux pour dénoncer les montants
astronomiques, d’amendes infligées à des hommes d’affaires, qui dépassent
souvent la valeur de leurs actifs sans qu’ils aient le droit de prendre
connaissance des griefs reprochés pour se défendre. Exilée à l’étranger, elle
revient au pays, il y a quelques mois seulement, avant d’annoncer sa
candidature hier.