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Démocratie et africanisation

Date de création: 19-04-2024 18:40
Dernière mise à jour: 19-04-2024 18:40
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VIE POLITIQUE- POINTS DE VUE ET OPINIONS- DEMOCRATIE ET AFRICANISATION

AU REGARD DE L’ACTUALITÉ AFRICAINE CONTEMPORAINE PEUT-ON PARLER D’AFRICANISATION DE LA DÉMOCRATIE ?

© Dr KOMIDOR NJIMOLUH HAMIDOU , Politologue/El Moudjahid, (Contribution) , dimanche  14 avril 2024

J’entre de plain-pied dans ce débat provoqué par la résonance des termes «africanisation de la démocratie», «mode de gouvernance», «endogénisation africaine des principes de la démocratie». La démocratie n’est pas un modèle fini, achevé et déposé en lieu sûr ( en occurrence en Europe) qui sert de mesure ou de référence universelle de gouvernance pour tous. La démocratie, entendue comme mode d’organisation des sociétés humaines, mode de répartition et de gestion des pouvoirs, ou simplement mode d’administration et de constitution d’État de droits, n’est pas une donnée en soi. Elle est une construction de l’esprit des hommes. Elle a muri selon les époques, selon les lieux et les circonstances, selon différents environnements et conceptions philosophiques ou cosmogoniques. Elle est aussi fonction des hommes et femmes au service de la société. La démocratie est in fine ce qu’en fait un leadership d’une société donnée. Ainsi donc un leadership éclairé, attaché à l’intérêt général, ayant adhéré à l’idéal des valeurs communément partagées par ladite société, met en place un modèle démocratique en adéquation avec les valeurs en vigueur dans ladite société. La démocratie n’est point une invention occidentale. Elle a été découverte bien longtemps chez les Égyptiens et Solon, père grec de la démocratie, la découvre dans les papyrus de la Vie dynastie égyptienne. On la découverte chez les Athéniens comme participation directe d’une minorité du peuple à la gestion de la cité. On la découverte dans les villes phéniciennes ou sous l’arbre à palabre bantoue sous forme de prise de parole, d’élection, ici, ou d’élaboration des lois de gestion sociétale, ailleurs. C’est dire que la démocratie n’est pas et n’a jamais été un produit fini avec toutes ses composantes : élection, expression libre, institutions gouvernantes, lois organiques, mode de répartition et d’évolution des pouvoirs. Elle n’a jamais été donnée comme modèle universelle d’organisation ou de gestion étatique. Elle est ici où on la construite en fonction de la démographie, des ressources de la société, de l’éthique, de la valeur reconnue à l’homme et à la femme, ainsi qu’en rapport avec la valeur qu’on reconnaît à la société. Le rapport de l’homme et la société n’est pas le même dans toutes les sociétés.

 C’est l’Afrique qui a subi l’esclavage

La méconnaissance de cela constitue une dérive à la conception qui se veut occidentale de la démocratie. Il ressort que l’Afrique d’aujourd’hui est une Afrique qui ne se reconnaît plus à travers le miroir de nos ancêtres et anciens empires. C’est l’Afrique qui a subi l’esclavage, dont les richesses du sol et du sous-sol ont été spoliées, volées… C’est une Afrique culturellement en dysfonctionnement, en état d’hybridisme depuis sa rencontre avec l’Occident. C’est une Afrique qui attend un passage en psychiatrie pour retrouver son identité, désormais plurielle, et se construire une nouvelle personnalité pour un leadership tant attendu. Les soubresauts au Niger, au Mali et partout ailleurs en Afrique sont autant de signes révélateurs que la démocratie est dans l’ADN de l’Afrique et de l’Africain. Elle se manifestera et prendra la couleur locale de son expression. Elle attend qu’on la laisse sans pression extracontinentale pour s’épanouir en mode de gestion sociétale libre. Il faut dire que la démocratie n’est ni bonne ni mauvaise, ni parfaite ni imparfaite. Elle demeure un principe en évolution permanente, en construction continue, tout en épousant son siècle. C’est en 1265 que l’Angleterre a connu son premier parlement : le parlement de Montfort. Les idées de limitation des pouvoirs germent avec la Renaissance et apparaissent avec l’habeas corpus en 1679… La République Corse et sa Constitution sont connues en 1755, et la Révolution haïtienne a instauré la République avant la France en 1791. Au 19e siècle, c’est l’apparition des partis politiques … C’est dire combien la démocratie, une vue de l’esprit, est une lente maturation et pouvant se muer aussi brutalement dans la séquence d’une révolution. L’éclosion d’une élite africaine attachée à l’intérêt général

Ce qui attend l’Afrique, c’est l’éclosion d’une élite africaine consciente, attachée à l’intérêt général, décomplexée, jouant le jeu des intérêts africains et respectueuse des valeurs africaines. Ce qu’il faut à l’Afrique, ce n’est pas une démocratie importée, modèle déposé, mais une construction locale de l’État de droits, une forte éducation au civisme, une forte contrainte contre la corruption, un grand amour de la patrie et un fort sentiment d’appartenance à l’Afrique. L’Occident contemporain calibre la démocratie à l’aune des désirs de l’individu. L’homme occidental est évalué comme étant au-dessus de la société et il est maître de ses désirs. La qualité de société démocratique est désormais fonction de l’orientation sexuelle des individus et du degré de leur intégration dans une société donnée. Il nous semble que l’Afrique a dit non à l’importation de cette démocratie. Les domaines d’expression de la démocratie se sont multipliés vers des tendances nouvelles : la démocratie participative adoptée par des communes ou des collectivités locales, les consultations populaires, voire l’observation des engagements des élus par de groupes de citoyens. Toutes ces formes sont fonction des environnements, de la démographie, des ressources et des volontés politiques. L’Afrique évoluera vers la démocratie de ses moyens, peut-être que cela s’appellerait l’endogénisation des règles de la démocratie, peut-être tout simplement une quête de bonne gouvernance, entendue comme l’application et le respect des règles adoptées sans contraintes. En attendant d’élargir un tel échange vers des spéculations de philosophie politique, soumettons ce qui précède à la critique contradictoire et nourricière de paradigmes nouveaux.