L’année
2023 est la plus meurtrière de la décennie pour les migrants clandestins. Selon
les derniers chiffres de l’Organisation mondiale pour les migrations (OIM), au
moins 8565 personnes sont mortes sur les routes de la migration dans le monde,
l’année dernière, principalement en Méditerranée.
«Le
nombre de morts en 2023 représente une augmentation tragique de 20% par rapport
à celui de 2022, ce qui souligne le besoin urgent d’agir pour éviter de
nouvelles pertes en vies humaines», alerte cette agence de l’ONU dans un communiqué.
L’Afrique
du Nord est fortement concernée par ce bilan dramatique. A commencer par
l’Algérie. Selon le sociologue et spécialiste des mouvements migratoires,
Mohamed Saïb Musette, le pays compte le plus de
harraga en provenance d’Afrique du Nord (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye et
Egypte) qui ont trouvé la mort durant la traversée.
Dans
une note d’analyse des chiffres de l’OIM, le chercheur algérien fait, en effet,
remarquer que la plupart des décès liés à la «harga» (migration clandestine) ont lieu en
Méditerranée. «D’une manière globale, les
ressortissants du Maroc tiennent la première position pour le dernier trimestre
2023, en nombre de tentatives de migration.
Les
tentatives en provenance de l’Algérie donnent une moyenne mensuelle, assez
faible par rapport à d’autres pays de l’Afrique du Nord, avec 596 reversées
pour l’année 2023. Mais l’Algérie compte plus de décès, soit 36% des 671
observées par l’OIM dans les pays de l’Afrique du Nord»,
écrit le sociologue dans une note publiée sur sa page Linkedin.
Soulignant
que la destination des candidats à la migration est, comme le confirment les
données de l’agence Frontex, les 27 pays de
l’Union européenne, le chercheur souligne une hausse du nombre de harraga
d’Afrique du Nord durant l’année écoulée. «Ces données
font état de 379 929 tentatives d’immigration irrégulière, à travers
l’ensemble des voies (terrestre, maritime) vers les 27 pays de l’UE pour
l’année 2023.
La
part de tentatives en provenance de l’Afrique s’élève à 178 796, soit près
de la moitié (47%), dont le tiers (34%) venant des pays de l’Afrique du Nord
avec 61 726 candidats», explique le chercheur.
Par
voie maritime, la proportion des traversées en provenance de l’Afrique du Nord
est encore plus élevée. «Les tentatives par voie
maritime (toutes les routes) montrent que les pays de l’Afrique du Nord
(Algérie, Egypte, Libye Maroc, Tunisie, Soudan) cumulent 84% de traversées vers
les rives des pays du Nord», explique-t-il.
Par
période de l’année, Mohamed Saïb Musette affirme «que l’observation de l’évolution des traversées maritimes
mensuelles en 2023 confirme une poussée exceptionnelle des Tunisiens durant la
période estivale, mais durant le premier semestre de la même année, ce sont les
Egyptiens qui enregistrent le plus d'interceptions.
Les
traversées en provenance de la Libye semblent très faibles».
«Cette faiblesse est à relativiser sachant les
victimes du naufrage de l’Ariana au large de la Grèce proviennent de la Libye»,
fait-il remarquer.
En
janvier 2024, l’ONG espagnole Caminando Fronteras a annoncé dans un rapport que «6618 migrants ont
perdu la vie en tentant de rejoindre l’Espagne depuis les côtes nord-africaines
en 2023».
Ce
document, qui a traité l’afflux de migrants irréguliers vers l’Espagne durant
l’année écoulée, souligne que le nombre de morts ou de disparus en mer a
augmenté de 117% par rapport à 2022.
Selon
l’ONG, «l’année 2023 a été l’année la plus meurtrière
avec en moyenne un mort toutes les 18 minutes dans les eaux entre l’Afrique du
Nord et l’Espagne».