COMMUNICATION- ETRANGER- USA/PRESSE LOCALE 2022
L’ extinction de la presse locale s’accélère aux Etats-Unis. En 2022, les journaux
locaux avaient fermé au rythme de deux chaque semaine, selon l’école de
journalisme de la Northwestern Univer-
sity (Illinois). En 2023, la moyenne s’est établie à 2,5
fermetures hebdomadaires, indique le rapport annuel publié en novembre par
l’université.
Plus de 130 journaux ont fermé ou été absorbés, un phé-
nomène que nombre d’experts estiment lié aux plaies
actuelles de la
démocratie
américaine : désinformation, corruption, polarisation.
En
moins de vingt ans, un quart des journaux américains ont plié
bagage.
Plus de 200 des 3 143 comtés du pays sont maintenant
considérés
comme des « news deserts » (« déserts d’information
») :
ils n’ont plus aucun
journal local. Dans plus de 1 500 autres, il n’y a
plus
qu’une source d’information régionale, en général un hebdo-
madaire. Un Américain sur cinq vit dans
une de ces zones. Du fait du déclin de la publicité et de la concurrence
d’Internet, les Etats-Unis ont perdu plus de 2 500 journaux depuis 2005 et 43
000 journalistes, soit près de deux tiers des effectifs des rédactions. La Northwestern University estime
qu’un tiers des journaux locaux auront probablement fermé d’ici à la fin de
2024.
Les
quelque 6 000 journaux survivants sont pour la plupart des hebdomadaires,
possédés par des firmes d’investissement qui cher-
chent à réduire les coûts.
Depuis
2005, les revenus de la presse ont plongé, passant de 50 milliards de dollars
(près de 45,8 milliards d’euros) à 20 milliards de dollars. Les médias en ligne
qui ont éclos un peu partout – le rapport en compte 550 – ne sont pas assez
nombreux pour prendre la relève, et ils desservent principalement les grandes
agglomérations. « La perte de médias locaux dans les quartiers pauvres ou délaissés
constitue une crise pour notre démocratie », estime la pro-
fesseure Penny Abernathy, une spécialiste
de l’économie des mé-
dias, coautrice du rapport. Une centaine d’associations
ont annoncé
la
création d’un fonds d’aide à la presse locale doté de 500 millions
de
dollars sur cinq ans. Le rassemblement, appelé Press Forward, est
conduit
par les plus grandes fondations philanthropiques du pays
(MacArthur
Foundation, Knight Foundation,
Ford Foundation, Carnegie Corporation...). Son but : faire
éclore une « renaissance » de l’information locale et de refaire du journalisme
de proximité « une force de cohésion sociale ». Autre initiative : le groupe
American Journalism Project, lancé en décembre 2019
par John Thornton, le fondateur du Texas Tribune, l’un des principaux médias à
but non lucratif du pays. Il soutient maintenant 41 rédactions dans l’ensemble
du pays, avec un financement de 150 millions de dollars.
Sur
le plan législatif, deux élues ont présenté un projet de loi devant la Chambre
des représentants à Washington pour aider la presse locale. Selon ce texte,
déposé par la républicaine Claudia Tenney et la démocrate
Suzan DelBene, les
restaurants ou les magasins qui font de la publicité dans les journaux locaux
bénéficieront de réductions d’impôt à hauteur de 5 000 dollars. Les médias
locaux qui recrutent des journalistes seront exemptés d’impôt sur la masse salariale
à concurrenc de 25 000 dollars par employé.
En
Californie, quelque 50 rédactions à but non lucratif ont été lancées en cinq
ans, pour la plupart dans des communautés rurales ou à majorité peuplées
d’immigrants. L’assemblée de l’Etat a décidé de financer une formation à
l’information locale à l’université de Californie à Berkeley. Elle a aussi
commencé à examiner un projet de loi prévoyant une compensation par les géants
des technologies comme Google et Facebook, sur le modèle européen.