SANTE – MALADIE- BPCO/MALADIE
PULMONAIRE OBSTRUCTIVE CHRONIQUE
© Horizons/ S. Belabed, samedi 18 novemvre 2023
Dans cet entretien, le Dr Rachid Chahed, pneumologue libéral à Tizi Ouzou, revient sur la
BPCO qu’il qualifie de maladie sournoise et ses complications. Il recommande
aussi des traitements pour s’en prémunir.
Quelle est la situation de la BPCO en Algérie
?
Permettez-moi d’abord de donner
une définition simple, la plus récente de la BPCO. La maladie pulmonaire
obstructive chronique BPCO est une affection pulmonaire hétérogène caractérisée
par des symptômes respiratoires chroniques, à savoir dyspnée, toux, production
d’expectorations et exacerbations incurables dues
à des anomalies des voies
respiratoires, bronchite, bronchiolite ou alvéoles qui
provoquent des troubles
persistants voire souvent une obstruction
progressive de l’air. Une exposition à un ou des gaz nocifs comme le tabagisme ou la biomasse sont les principaux
facteurs de risque. Dans le monde, 50 millions de personnes continuent de se
chauffer et de cuisiner avec le charbon. En Algérie, la maladie est toujours
sous-diagnostiquée et évolue à bas bruit sur plusieurs années. C’est une
maladie sournoise, silencieuse, appelée l’inconnue meurtrière et la majorité de
nos patients arrivent à un stade tardif.
Comment se manifeste la complication de la
BPCO ?
L’exacerbation est un événement
aigu caractérisé par une aggravation des symptômes respiratoires, notamment la
toux, l’expectoration et la dyspnée. Elle peut être légère, modérée et sévère
mais nécessite une hospitalisation car elle met en danger le
pronostic vital de ces patients. Au-delà des variations quotidiennes, elle
conduit à une modification thérapeutique par une simple augmentation des
bronchodilatateurs. Dans ce cas, une durée supérieure de 24 heures
est requise pour parler d’exacerbation. Nous proposons aussi un traitement supplémentaire
antibiothérapie ou corticothérapie orale qui a
une place importante dans le traitement des cas sévères pour une durée de cinq
jours comme des études l’ont prouvé. Devant un patient non connu
comme atteint de BPCO, mais présentant un tableau d’infection respiratoire
basse ou tout épisode aigu de symptômes, il faut penser à une exacerbation
aiguë de la BPCO devant l’existence d’un ou plusieurs éléments.
Quels sont les facteurs de risque ?
Le coupable est identifié, c’est
surtout le tabac. Devant un âge supérieur à 40 ans, un tabagisme actif ou
exposition professionnelle à des empoussiérages, une dyspnée, une toux. Il est
temps d’arrêter le tabac avant que les symptômes ne surviennent chez le patient
atteint de la BPCO. La présence de comorbidités connues comme fréquemment
associées à la BPCO coronaropathie, insuffisance cardiaque, hypertension
artérielle, anxiété, dépression, ostéoporose, diabète, dénutrition et cancer
bronchopulmonaire.
Quel est l’impact des
exacerbations sur le malade ?
Le taux de mortalité à court et long terme est
très élevé. Environ 50% des décès
sont survenus après 5 ans d’une exacerbation sévère et nous aurons un déclin
plus rapide de la fonction respiratoire et par conséquent la qualité de vie est
détériorée. Le malade a un risque accru d’événements cardiovasculaires dans les
semaines suivantes (syndrome coronarien, AVC). Il y a un risque
accru de dépression, d’où l’importance de traiter rapidement ces exacerbations
dont l’impact est majeur.
L’identification et le traitement doivent être précoces. La prévention commence
par l’arrêt du tabac qui est un élément
capital pour éviter l’exacerbation. Il est tout aussi
important de mettre en place un plan personnalisé pour accompagner le malade.
Pour éviter la détérioration et la complication de la BPCO, le médecin traitant
doit régulièrement demander une radiographie thoracique, l’électrocardiogramme
et un bilan biologique. L’examen le plus important à demander est la gazométrie
artérielle. L’activité physique est aussi recommandée
pour réduire le risque d’exacerbation. Généralistes, infectiologues,
pneumologues et cardiologues doivent insister sur l’activité physique régulière
de 30 à 45 minutes puisque l’Algérie ne dispose pas de centres de
réhabilitation équipés, comme c’est le cas dans plusieurs pays. Le manque
d’activité entraîne une fonte musculaire, une inadaptation à l’effort et une
aggravation de la dyspnée qui met le patient de la BPCO dans un cercle vicieux
et qui peut dériver vers l’exacerbation. La réhabilitation doit
être faite immédiatement pour éviter les complications. La vaccination contre
la grippe, le pneumocoque, et même récemment contre la coqueluche permet de se
protéger d’un risque d’aggravation de la BPCO ou de décompensation par ces deux
infections, notamment chez les patients à risque.