RELATIONS INTERNATIONALES- ISRAËL-
ISRAËL/PALESTINE OCCUPÉE/DIPLOMATIE FRANCAISE
© Huffpost, Marie Haynes, dimanche 15 octobre 2023
Alors que le paysage politique
français s’embrase autour de la position de La France insoumise sur la guerre en cours
entre Israël et le Hamas, le groupe de gauche se justifie
en estimant porter « la position historique de la France depuis Charles de
Gaulle. » Effectivement héritée de la politique du premier président de la
Vème République, cette position a cependant connu soubresauts et revirement ces
cinquante dernières années, comme vous pouvez le voir dans la vidéo en
tête d’article.
Le rapport de De
Gaulle à Israël est particulièrement complexe. Après la Seconde Guerre
mondiale, le général soutient sans ambiguïté la création de l’État d’Israël,
qu’il qualifie durant des années de pays « ami et allié ». Mais l’année
1967 marque un tournant, non seulement avec la guerre des Six jours au cours de
laquelle Israël lance une offensive contre l’Égypte ; le président de la
République décrète alors un embargo sur la vente d’armes à Israël. En novembre
de cette année-là, une petite phrase du général met aussi le feu aux poudres. À
l’occasion d’une conférence de presse, le président français revient sur
l’établissement de l’État d’Israël, et qualifie les Juifs de « peuple
d’élite, sûr de lui-même et dominateur. »
Toujours mystérieuse
pour beaucoup de spécialistes , la phrase traverse les
années et entache les relations franco-israéliennes. Elles ne vont d’ailleurs
pas s’arranger sous les mandats de Georges Pompidouou
et Valéry Giscard d’Estaing, dont les politiques sont jugées
pro-arabes.
Il faut dire que le
mandat de Pompidou commence par un épisode qui pose les bases d’une relation
compliquée. Le 24 décembre 1969, un commando israélien subtilise dans le port
de Cherbourg, cinq vedettes militaires non-armées, commandées et payées par
Israël, mais dont la livraison est bloquée dans le cadre de l’embargo. Les
vedettes arrivent sans encombre à Haïfa en Israël, la France est ridiculisée,
suscitant la colère du chef de l’État.
Sous Giscard,
et en pleine crise pétrolière, le rapprochement de la France avec les pays
arabes se poursuit. Le président français reconnaît l’OLP, l’Organisation de
Libération de la Palestine, présidée par Yasser Arafat et la France vote pour l’obtention de son statut
d’observateur aux Nations unies. En 1980, Valéry Giscard d’Estaing va plus
loin, et reconnaît le droit du peuple palestinien à l’auto-détermination.
Élu en 1981, François
Mitterrand qui est le premier président de la République à faire une
visite d’État en Israël cherche à réchauffer les relations entre les deux pays.
Lors de son discours historique à la Knesset, le parlement israélien, en 1982,
il loue une solution à deux États.
Sous Jacques
Chirac, c’est le retour d’une diplomatie considérée comme pro-arabe.
Dans les mémoires des Palestiniens, le chef d’État français est considéré comme
un ami notamment depuis la célèbre scène du 22 octobre 1996, lorsqu’à Jérusalem,
le président s’en prend, dans un anglais hésitant, aux agents de sécurité israéliens
qui s’interposent entre lui et des Palestiniens venus le saluer.
Au-delà de cette
anecdote, Jacques Chirac s’implique dans le processus de paix tout en affichant
son attachement à un État palestinien, et une proximité avec Yasser Arafat.
Tout cela crispe en Israël.
Un nouveau revirement
a lieu sous Nicolas Sarkozy, qui compte bien prendre le
contre-pied de son prédécesseur avec une position ouvertement pro-israélienne,
même s’il continue de véhiculer un message de paix. Les relations se
réchauffent, mais sa marge de manœuvre limitéeet le
processus reste figé.
François Hollande tient lui à adopter la
neutralité la plus pure dans le conflit, une position qui l’oblige constamment
à temporiser, notamment lors du regain de tensions de l’été 2014. À ce moment,
il exprime d’abord sa solidarité avec Israël avant de réajuster son discours
pour finalement avoir un mot pour les victimes palestiniennes. Par ailleurs, et
contrairement à une promesse de campagne, François Hollande n’est jamais allé
jusqu’à la reconnaissance de l’État palestinien.
Sous Emmanuel
Macron finalement, les relations avec Israël restent fluides, malgré
des accrochages sur le dossier nucléaire iranien. Tout en continuant à apporter
une aide financière conséquente aux territoires palestiniens, le président ne
bouge pas d’un iota sur sa position exprimée en 2017 : la France ne reconnaîtra
pas de manière unilatérale l’État de Palestine.