HISTOIRE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ESSAI DE AMAR
MOHAND AMER- « LA CRISE DU FLN DE L’ÉTÉ 1962...... »
INDEPENDANCE DAY(S)
La crise du Fln de l’été 1962.Indépendance nationale et enjeux de
pouvoir(s). Essai de Amar Mohand-Amer, Editions Frantz Fanon, Alger 2023, 382 pages, 2
000 dinars
Un ouvrage qui reprend et reconfigure une thèse soutenue il y a dix ans et dont le contenu n’est nullement dépassé de nos
jours.
Un ouvrage qui démontre, faits à l’appui, qu’en matière de détention et
d’exercice du pouvoir politique , rien n’est jamais
« joué d’avance » et rien n’est durable.
Un ouvrage qui analyse un moment de l’Histoire du pays ; un moment en
apparence assez court, mais qui se trouve parsemé de très nombreux et
difficiles événements où les revirements , les combats
fratricides et les protagonistes sont légion.
Enfin, un ouvrage qui nous permet de découvre un « historien qui
connaît son métier ». Ni un théoricien de l’histoire, ni un
philosophe, ou un romancier de l’histoire mais un chercheur méticuleux et
précis.....De l’histoire comme on l’aime car elle restitue les événements , petis et grands, dans leur contexte....et pris dans la
tourmente des passions humaines, non pas inventées mais ancrées dans le réel,
avec ses retournements, sesions, ses trahisons, ses
assassinats, ses purges, ses conflits entre « frères », ses morts
inutiles n’ayant rien à voir avec la guerre de libération....mais plutôt avec
une guerre (ou des « guerres ») de succession.
On a donc:
Un (court) chapitre préliminaire qui traite de la situation politique du
Fln entre le 1er novembre 1954 et le 18 mars 1962 ;
chapitre qui permet d’appréhender la dynamique générale et la portée des crises
antérieures sur celle de l’été 1962.
Une première partie qui analyse l’évolution des rapports politiques au sein
du Fln ; du cessez-le-feu du 19 mars 1962 au Cnra
de Tripoli de mai/juin 1962.. Une place particulière
est donnée à Ahmed Ben Bella et aux Wilayas.
Une deuxième partie aborde l’implosion du Fln historique.....Un
Fln divisé face à l’Aln avec des risques réels d’une
guerre civile et d’une « congolisation » du
pays .
La troisième partie traite du dénouement politique et militaire de la
crise...la violence armée mettant un terme à la
crise...et voyant le Groupe de Tlemcen et son leader Ben Bella vainqueurs
du conflit......Et, Mohamed Boudiaf créant, le 20 septembre 1962,
le premier parti d’opposition, le Prs.....alors que l’Ugta
est « ostracisée »
L’Auteur :Docteur en Histoire (Paris 7),
chercheur en socio-anthropologie de l’Histoire et de la Mémoire,
directeur-adjoint du comité de rédaction de la revue Insaniyat (Crasc d’Oran).Travaille sur les processus de transition,
les trajectoires individuelles et de groupes, la violence en temps de guerre,
les questions mémorielles et les récits historiques alternatifs
Table des matières :Préface (Omar Carlier) /
Introduction/Première partie : Les enjeux conflictuels de pouvoir (s) au
Fln (3 chapitres) / Deuxième partie : L’implosion du Fln historique (3
chapitres)/ Troisième partie : Le dénouement politique et militaire de la
crise (3 chapitres)/ Conclusion/ Postface (Mohammed Harbi)
/ Liste des documents annexes/Bibliographie générale/ Chronologie indicative de
la crise/ Correspondance des noms des villes/Correspondance des rues
d’Alger/Glossaire/ Index
Extraits : « La
constitution de l’Emg marque un tournant dans
l’histoire du Fln et de l’Aln.Pour la première fois
depuis le 1er novembre 1954, l’Aln
est dotée d’un commandement militaire national avec des prérogatives biens
définies » (pp 35-36), « En nommant le colonel Boumediene à ce poste
stratégique (direction de l’Etat-major (unifié) de l’Aln),
les « triumvirs » choisissent le moins « maquisard » des
chefs de l’Aln, mais le plus efficace et le plus
organisé (p37), « Entre janvier et juillet 1961, la Fédération de France
du Fln achemine trois cent-trois cadres dont un ingénieur, six médecins et cent
sept étudiants » (pp 111-112), « En un an (1962), le bilan de
la politique de la « terre brûlée » mis en application par l’Oas s’élève , selon Harbi, à
2 000 morts et 5 000 blessés (p 146) , « Ironie ou ruse de
l’histoire, cette situation (« la situation politique jugée
précaire du Gpra », fin juin 1962)
favorise l’intrusion dans le jeu politique de l’émir Said
El Djazaïri, petit-fils de l’émir Abdelkader .Après
avoir officiellement revendiqué le trône de l’Algérie, il reconnaît finalement
l’autorité du Gpra » (Le Monde, 7 juillet 1962, cité
p 176), « Vingt deux jours après l’Indépendance,
la guerre fratricide au sein du Fln a fait voler en éclat les dernières digues
« morales » entre les frères, devenus ennemis » (p 207),
« Pour la rédaction du journal (El Moudjahid -historique, éditorial du 13
juillet 1962 ) , la crise n‘est pas idéologique, mais l'expression violente de
la guerre des chefs » (p 268),
Avis : Pour bien comprendre
l’évolution politique du pays de l’Indépendance......à nos jours......ou
presque. Un ouvrage qui détricote une « crise » avec force
Détails ; une crise certes passagère mais aux retombées profondes sur
le poids , l’exercice et les dérives du
« pouvoir ».
Citations : « Agitateur »
en 1956, il (Ahmed Ben Bella) est , à sa sortie de prison, devenu un
« homme d’Etat » (Jean Daniel, L’Express, 15 mars 1962, cité p 69),
« Le Fln est plus un agglomérat de dirigeants que l’expression d’un parti
doté de mécanismes démocratiques de prise de pouvoir « (p83), « D’outre-tombe, Abane Ramdane devient un
protagoniste de la crise du Fln de l’été 1962 » (pp 85-86), « Rabah Bitat révèle déjà un tempérament d’homme-tampon»( 180),
« C’est l’ébauche d’un système dans lequel la revanche sociale sert
d’aiguillon et de masque à la formation d’une nouvelle classe
sociale »(Mohamed Harbi, in « L’Algérie et
soin destin », cité p 297), « Les historiens doivent savoir qu’ils
sont aussi des citoyens .Ils doivent aider à l’élaboration d’un récit national
qui exprime la diversité politique, sociale et religieuse de toutes les
composantes de l’ensemble algérien » (Mohammed Harbi,
postface, p 299)