EDUCATION-
PERSONNALITES- MAHFOUD BENNOUNE (SOCIOLOGIE/ANTHROPOLOGIE)
Il y a 19 ans, le 17 mai 2004 , disparaissait – aux Usa où il résidait auprès de sa fille,
Karima, une professeur de Droit en Californie - le combattant pour la
libération du pays, et anthropologue Mahfoud Bennoune
à l’âge de 68 ans. L’enfant d’El Akbia était un
universitaire qui a abondamment écrit dans les trois langues (arabe, anglais et
français), des travaux et des publications dans lesquelles il a exploré et
analysé des aspects politiques, économiques et sociaux de l’Algérie et du
tiers-monde. Le défunt avant de s’engager dans l’aventure intellectuelle, s’est
investi dans la lutte armée contre le colonialisme dès 1955.
Il rejoignit le maquis et servit d’agent
de liaison auprès d’icônes de la Révolution, comme Youcef Zighout,
Abane Ramdane et Lakhdar Bentobbal. Arrêté à Alger lors d’une mission, il écopera de
5 ans de prison. A la signature des Accords d’Evian, il sera désigné membre de
la commission mixte du cessez-le-feu et sera par la suite aux côtés de Mohamed
Boudiaf, à la création du Parti de la Révolution Socialiste (PRS). Engagé
politiquement, notamment auprès de Mohamed Boudiaf en 1992, il sera désigné
membre du Conseil national consultatif (CCN) dont trois de ses collèges
tomberont sous les balles du GIA entre mars et juillet 1993 (Hafid Senhadri, Laâdi Flici, Mohamed Boukhobza).
Né le 9 avril 1936 au Douar El Akbia dans l’actuelle commune de Sidi Marouf
(région d’El Milia, wilaya de Jijel), Mahfoud Bennoune
a étudié après l’indépendance en France puis aux Etats-Unis où il obtiendra en
1976 son doctorat à l’université du Michigan sur le thème de « l’impact du
colonialisme et de l’émigration sur la paysannerie algérienne ». De retour
en Algérie en 1977, il enseignera à l’Jnstitut de
sociologie de l’Université d’Alger, puis sera nommé en 1979 directeur de l’Institut
des techniques de planification et d’économie appliquée jusqu’à sa démission en
1981.
Il a aussi enseigné aux États Unis, et a
publié plusieurs recherches et ouvrages. D’un profond retour aux sources
jaillira en 1986, une monographie de sa région natale dédiée « à
la mémoire des 7% des habitants du douar El Akbia
lâchement assassinés par l’armée coloniale ou tombés au champ d’honneur entre
1954 et 1962 » : « El Akbia, un
siècle d’histoire algérienne 1875-1975 » (OPU, Alger, 1986). Son père,
Lakhdar ainsi que deux de ses frères, Ali et Amar, ont été froidement exécutés
par l’armée coloniale. El Akbia, ce sont les Beni Kaïd
d’El Milia, population qui proviendrait d’une seule famille, écrira-t-il,
et « qui se serait séparée des Beni Kaïd de Jijel au 16ème siècle » pour
s’installer dans cette région.
Cette étude a commencé par une
description des rapports entre les Beni Kaïd et les autorités pré-coloniales de la province de Constantine et du conflit
qui les opposait pour l’impôt, puis une analyse de ce groupe avec les autorités
coloniales françaises, établissant dans ce sillage les modifications ayant
touché le paysage algérien afin d’établir des rapports de domination, et enfin
les rapports de la paysannerie avec la bureaucratie post-coloniale. Elle s’est
poursuivie avec le processus d’émigration et d’immigration qui sera largement
abordé depuis le projet d’émigrer « du paysan en voie de
prolétarisation. » Cette migration en France, est pour Bennoune elle-même « un sous-produit tant de
la colonisation que de l’ingérence du marché capitaliste ».
Note : Avec
son ami Ali El Kenz, il a publié (Enag,
1990) « Le hasard et l’histoire.Entretiens
avec Belaid Abdesselam »